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Le week-end était long et vous n’avez pas suivi toute l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là. Joyeux mardi, nous sommes le 17 septembre 2024, la France a presque un gouvernement, et voilà votre briefing hebdo.
PLS2025 • Le vœu de Pierre Moscovici est exaucé : dans un entretien au Parisien, il avait annoncé préférer un “léger retard” plutôt qu’un projet de loi de finances superficiel, basé sur l’architecture à dépenses constantes préparée par le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal, qui serait largement amendé a posteriori au Parlement. Le gouvernement Barnier en gestation a manqué la date du 13 septembre où il devait saisir le haut conseil des finances publiques (HCFP) présidé par Pierre Moscovici pour avis sur le PLF2025.
Ce retard risque néanmoins de s’avérer de plus en plus sérieux alors que la date butoir du premier mardi d’octobre (qui, manque de chance, tombe au plus tôt cette année, le 1er octobre) est une obligation qui découle de la loi organique (Art. 39 de la LOLF). Le temps presse puisque le Conseil d’Etat, qui doit être également destinataire du texte en amont de son dépôt sur le bureau de l’Assemblée, prend d’habitude entre 12 et 13 jours pour examiner le projet.
Si ses conséquences juridiques sont peu claires à ce stade, ce retard menace de compliquer un peu plus les débats parlementaires. Qui plus est dans un contexte où le regard de la Commission européenne sera omniprésent compte tenu de la procédure pour déficit excessif ouverte contre la France en juillet dernier. Le gouvernement a d’ores et déjà demandé un délai à Bruxelles pour transmettre son projet de budget après la date normale du 20 septembre.
@Mika Meister
Comme nous vous le rappelions la semaine dernière, différents scénarios sont désormais possibles. Un dépôt avant le 10 octobre permettrait d’espérer un vote avant la fin de l’année (le Parlement doit disposer de 70 jours de débat). Dans le cas d’un dépôt ultérieur, le gouvernement pourrait faire voter une loi spéciale l'autorisant à percevoir les impôts, et ouvrirait par décret les crédits se rapportant aux services votés pour 2023. Hypothèse moins probable mais à envisager : en cas de budget ni voté ni rejeté après soixante-dix jours de débat, le gouvernement pourrait le mettre en œuvre par ordonnances.
Enfin, en cas de rejet par le Parlement de tous les textes présentés par le gouvernement, un risque de shutdown à l’américaine ne serait pas à exclure, avec la perspective d’une suspension du versement des prestations ou des traitements des fonctionnaires.
CALME OLYMPIEN • La période olympique s’est définitivement terminée pour Paris le 8 septembre dernier sans événement sécuritaire majeur si l’on excepte le sabotage de lignes ferroviaires dans la nuit du 25 au 26 juillet, en amont de la cérémonie d’ouverture. Les craintes largement exprimées d’attaques ou de perturbations de la cérémonie d’ouverture ou de compétitions olympiques ont néanmoins été écartées.
Afin d’assurer la sécurité des Jeux, des mesures administratives sans précédent ont été mises en place. 1,2 millions d’enquêtes administratives ont ainsi été conduites sur les personnes détentrices d’un pass Jeux, 559 mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) ont été prises, sans compter les périmètres SILT (du nom de la loi de 2017 qui en avait autorisé le principe) de restriction de la circulation à proximité des sites olympiques ou des cérémonies d’ouverture et de clôture. 45 000 policiers ont été mobilisés, exigeant de restreindre voire refuser la prise de congés sur la période.
Dans l’”héritage” des Jeux, la bonne coopération entre les deux forces police et gendarmerie, aux relations parfois tendues, pourra figurer en bonne place. En revanche, une QPC a été déposée pour que le Conseil examine la conformité à la Constitution de la procédure des MICAS, mesure administrative fortement restrictive de liberté, alors que les délais des recours devant le juge excèdent la durée même de la mesure.
PAS DÉPAYSÉ • Le 12 septembre dernier, le parquet général de Nouméa a rejeté la demande de dépaysement du procès des émeutes sur le Caillou qui avaient fait onze morts. Sept militants, dont Christian Tein, le leader de la CCAT qui vient d’être nommé à la tête du FLNKS, avaient été transférés le 23 juin dernier en France pour y être placés en détention provisoire.
La demande de dépaysement avait été introduite par la défense, arguant que les conditions n’étaient pas réunies sur l’île pour un procès équitable et dénonçant un "parti pris” du ministère public. Elle a aussi été soutenue par des magistrats du siège : CFDT-Magistrats avait saisi le Conseil supérieur de la magistrature le 5 septembre pour défendre le dépaysement. Pour ces derniers, l’ampleur du dossier, avec environ 1 milliard d’euros de préjudices directs justifiait qu’il soit confié à une juridiction spécialisée, avec des moyens importants. Le manque de moyens locaux risque de conduire selon eux à un enlisement de la procédure judiciaire.
CONCESSIONS NOCTURNES • La “taxe autoroutes” aura bien lieu ! Nous vous en parlions en juin dernier : le Conseil constitutionnel était saisi d’une QPC dirigée contre la nouvelle taxe sur les “entreprises exploitant des infrastructures de longue distance” créée par la loi de finances pour 2024. Le Conseil a déclaré conformes à la Constitution toutes les dispositions critiquées, validant donc la nouvelle taxe.
Pour comprendre l’origine de cette taxe, il faut revenir à son objectif initial, qui était de récupérer les profits générés par les concessionnaires autoroutiers, bien supérieurs à ceux attendus lors de la privatisation de leur gestion : 12% en moyenne, contre 7,7% attendus, selon un rapport de l’IGF de 2021.
Or, l’Etat a introduit en 2015 dans les principaux contrats de concession autoroutière une clause garantissant une réparation financière aux gestionnaires en cas d’instauration de taxes spécifiques à leur activité.
Ne pouvant donc taxer les seules autoroutes, sous peine de devoir les rembourser du même montant, Bercy a proposé une rédaction englobant tous les types d’infrastructures “permettant le déplacement de longue distance”, dont les aéroports, victimes collatérales de cette nouvelle fiscalité.
Les demandeurs avançaient que la taxe opérait plusieurs ruptures d’égalité, notamment en sortant du champ d’application les infrastructures de transport situées en Île-de-France, en imposant un même régime fiscal à des entreprises aux modèles économiques extrêmement différents, ou en ne prenant pas suffisamment en compte les capacités contributives des différentes entreprises.
Reste à voir si les recettes seront à la hauteur des 600 millions d’euros annuels projetés par Bercy, et si les concessionnaires autoroutiers reporteront les coûts sur les usagers.
RAZZIA SUR LE SNU • Le Service national universel (SNU) cher à Gabriel Attal a fait l’objet d’un rapport de la Cour des comptes qui tient lieu de premier bilan, cinq ans après le lancement de son expérimentation.
La Cour critique sévèrement sa mise en œuvre et son développement, dont elle souligne “l’absence d’horizon clair” et “l’insuffisante planification”. Lancé depuis 2019 sur tout le territoire, ses objectifs affichés de “cohésion nationale, d’engagement, d’orientation et d’insertion” sont encore mal compris des jeunes, et le dispositif n’a pas atteint ses objectifs en matière de mixité sociale.
Les coûts mentionnés par le rapport sont peu engageants : avec un objectif d’à peine 80.000 jeunes pour 2024, les crédits SNU représentent déjà 18% du programme “jeunesse et vie associative” du Ministère de l’éducation, soit 160 millions d’euros en loi de finances initiale.
L’estimation de la Cour des comptes pour une généralisation à toute une classe d’âge se situe donc entre 3,5 et 5 milliards d’euros annuels, contre les 2 milliards chiffrés par les porteurs de projet.
Surtout, tant l’accueil des mineurs que les recrutements et rémunérations des enseignants ont rencontré de sévères difficultés, entraînant des surcoûts et des perturbations de la commande publique liée au SNU, sans qu’”aucune stratégie” ni interministérielle ni locale n’ait pu être remarquée par la Cour.
L’étude annuelle du Conseil d’Etat sur la souveraineté, construite sur plus de 200 auditions, et qui analyse la notion d’un point de vue juridique, stratégique, économique.
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Hexagone est préparé et rédigé par Étienne Rabotin et Nicolas de Renghien. À la semaine prochaine !