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Hexagone propose un résumé hebdomadaire concis, bien documenté et informatif de ce qui fait l'actualité en France.

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Par Hexagone
25 juin · 4 mn à lire
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Déficit excessif, recours environnemental, concessions autoroutières

L'actu des décideurs éco et politiques, sélectionnée et analysée pour vous chaque semaine


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Le week-end était long et vous n’avez pas suivi toute l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là. Joyeux mardi, nous sommes le 25 juin 2024, et voilà votre briefing hebdo.


Le Briefing : principe de réalité

Alors que les programmes pour les législatives en France rivalisent de nouvelles dépenses ou baisses d’impôts, la Commission européenne vient de placer le pays en procédure pour déficit excessif. Principe de réalité et perspective de bras de fer à la rentrée : on vous explique tout ça dans votre newsletter préférée. 


Commission européenne @ EmDeeCommission européenne @ EmDee

DÉFICIT EXCESSIF • Peu couverte par les médias français dans cette période politiquement dense, le placement de la France en procédure pour déficit excessif le 19 juin n’en est pas moins structurante pour le court et moyen-terme. Les règles européennes, suspendues entre 2020 et 2023 du fait des circonstances exceptionnelles de la pandémie, imposent aux pays en déficit supérieur à 3% du PIB une réduction minimum de 0,5 point par an. 

Si Bruxelles juge que la trajectoire de réduction du déficit proposée par la France n’est pas assez ambitieuse, alors le pays pourrait être sanctionné à hauteur de 2,5 milliards d’euros par an. Avec un déficit projeté à 5,3% et une dette à 112% du PIB en 2024 (dont la Commission estime qu’elle atteindrait 139% en 2034 dans un scenario business as usual), la France devra faire des ajustements significatifs dans les années à venir.

PACTE RÉFORMÉ  • En suspens depuis un mois pour ne pas interférer dans la campagne européenne, la décision de la Commission fait application de la réforme entrée en vigueur le 30 avril 2024 visant à renforcer l’appropriation nationale des règles budgétaires. Est ajoutée la nécessité pour les Etats de présenter des plans budgétaires et structurels nationaux à moyen terme. En cas de dépassement des seuils de déficit ou de dette, un État devra définir une trajectoire d'ajustement d'une période de quatre ans. Cette période pourra être prolongée de trois ans si un État s'engage dans un programme "pertinent" de réformes et d'investissements. En revanche, l’obligation de réduction de 1/20 de l’écart du stock de dette au seuil de 60% a été supprimée.

PROGRAMMES LÉGISLATIFS • Cela signifie que la France, dotée a priori d’un nouveau gouvernement, devra fournir à la Commission un projet de budget à la mi-octobre prochaine. Or, les programmes pour les législatives se montrent particulièrement prolifiques en nouvelles dépenses et/ou moindres recettes pour les comptes publics. Même s’il faut prendre ces calculs avec précaution, la Fondation iFRAP a chiffré à 178 milliards d’euros la dégradation du solde public si le NFP appliquait son programme, soit un doublement du déficit actuel. Le coût du programme RN serait de 8,5 milliards tandis que celui de la majorité présidentielle serait de 4 millards. 

Dans tous les cas, à moins d’entamer un bras de fer avec Bruxelles, ces programmes seront donc caducs dès l’élection terminée. Pour rappel, en 2019, la Commission avait rejeté le projet de budget de Giuseppe Conte. Le président du conseil italien avait fini par s’incliner et reporter les mesures coûteuses pour maintenir le déficit dans les bornes préconisées par la Commission. 

Le MEDEF, qui a organisé une audition des responsables des principaux mouvements en lice pour les législatives le 20 juin dernier, a jugé les mesures économiques proposées par le NFP et le RN "inappropriées et même dangereuses". 


La suite après la pub — collaboration commerciale avec InterBev

Cette semaine, avec le site Agriculture-circulaire, nous vous proposons de découvrir le travail de Mathieu Bessière, ingénieur agricole spécialisé dans les systèmes d’élevage durable. Mathieu est à l’origine du développement du pâturage tournant dynamique depuis 2010, et formateur sur ce sujet auprès des éleveurs qu’il accompagne vers des pâtures productives, fertiles et résilientes. L’ingénieur explique que les bilans carbones réalisés dans le domaine agricole font souvent fit des services écosystémiques rendus par les herbivores dans les prairies où ils se nourrissent — et qui stockent d’importantes quantités de CO2. La question est complexe : Mathieu Bessière explore donc les différentes alternatives aux animaux d’élevage dans les prairies et ce qu’il se passerait si ceux-ci venaient à disparaître. Pour découvrir les perspectives de Mathieu en détail, lisez l’article dans son intégralité sur ce lien.


Mais aussi

CONTENTIEUX RELANCÉ • Mardi dernier, 18 juin, la cour d’appel de Paris a cassé deux jugements de première instance et déclaré recevables les recours d’un groupe d’ONG contre TotalEnergies et EDF. Si le contentieux climatique se concentre dans les tribunaux administratifs, puisque c’est là que sont jugés les recours en responsabilité contre l’Etat ou les autorisations de projets d’urbanisme et de construction, le juge judiciaire montre qu’il a son mot à dire dans les contentieux mettant en cause les comportements des entreprises. 

En l'occurrence, les associations s’étaient vues refuser par le tribunal judiciaire de Paris l’examen au fond de leurs requêtes, qui visaient à mettre en cause Total et EDF pour des manquements supposés à leur devoir de vigilance. Ce devoir, issu d’une loi de 2017, oblige les grandes entreprises à identifier et prévenir les risques liés à leur activité, et est un terrain déjà très fertile pour le contentieux climatique. 

Mais outre le fond de l’affaire (montrer, à terme, que ces sociétés ne se conforment pas aux objectifs de l’accord de Paris), cette décision est importante en ce qu’elle ouvre un peu plus grand les portes des prétoires aux associations et aux collectivités. Parmi les requérants figurent notamment la ville de Paris, dont l’exposition aux risques climatiques la rend admissible à agir contre une entreprise qui ne respecterait pas son devoir de vigilance. 

Autrement dit, les entreprises sont susceptibles d’être attaquées pour non-respect de leurs obligations de vigilance par des requérants toujours plus nombreux. 

CONCESSIONS NOCTURNES • Le Conseil d’Etat a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la “taxe autoroutes” qui avait été créée par la loi de finances pour 2024, et sur laquelle le Conseil d’Etat avait déjà rendu un avis pas tout à fait convaincu en 2023. 

Nous vous en parlions début janvier, les concessionnaires autoroutiers avaient échoué à faire censurer par le Conseil constitutionnel une nouvelle taxe sur les bénéfices de certaines entreprises, désignées de façon large comme les “entreprises exploitant des infrastructures de longue distance”, et supposée rapporter 600 millions d’euros annuels.

Pour comprendre l’origine de cette désignation alambiquée, il faut revenir à l’objectif initial de cette taxe qui était de récupérer les profits générés par les concessionnaires autoroutiers, bien supérieurs à ceux attendus lors de la privatisation de leur gestion : 12% en moyenne, contre 7,7% attendus, selon l’IGF.

Or, l’Etat a introduit en 2015 dans les principaux contrats de concession autoroutière une clause garantissant une réparation financière aux gestionnaires en cas d’instauration de taxes spécifiques à leur activité. 

Ne pouvant donc taxer les seules autoroutes, sous peine de devoir les rembourser du même montant, Bercy a proposé une rédaction englobant tous les types d’infrastructures “permettant le déplacement de longue distance”, dont les aéroports, victimes collatérales de cette nouvelle fiscalité.

Pour autant, la rédaction n’avait pas tout à fait convaincu la formation consultative du Conseil d’Etat, qui avait déjà, en mars 2023, critiqué l’imprécision de la formule. 


Nos lectures de la semaine

  • Alors que les couloirs des ministères résonnent des discussions sur une possible arrivée du Rassemblement national à la tête de l’administration, ce discours de Jean-Marc Sauvé, alors vice-président du Conseil d’Etat, prononcé en 2018 devant les étudiants de l’ENA et de l’INET : “Servir l’Etat aujourd’hui”. 

  • Le International Comparison Program de la Banque mondiale, édition 2024, qui compare les économies en parité de pouvoir d’achat (PPP). Un dollar dans chaque pays ne permet pas d’acheter la même chose, comparer la richesse relative de chaque pays se fait plus finement en égalisant le niveau des prix. Il est notable qu’à cette aune, la France ait dépassé le Royaume-Uni depuis 2017.


Hexagone est préparé et rédigé par François Valentin, Étienne Rabotin et Ghislain Lunven de Chanrond. À la semaine prochaine !

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