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Par Hexagone
13 févr. · 4 mn à lire
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Une nouvelle autorité nucléaire ?

Une nouvelle autorité nucléaire ? • Mais aussi — Droit du sol, PSG, Violences sexuelles, Remaniement


Bonjour. Nous sommes le 13 février 2024 et voici votre condensé d’actualité utile sur la France. Suivez-nous également sur X et LinkedIn !


Le Briefing 

Le projet de loi du gouvernement visant à mettre en place une autorité indépendante unique de sûreté nucléaire civile a été examiné en séance publique au Sénat le 7 février dernier. Le scrutin de la chambre haute aura lieu aujourd’hui.

Nos rédacteurs vous expliquent les enjeux de ce projet de loi.

© pixabay© pixabay

ATOMES CROCHUS • Visant à créer une nouvelle Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) issue de la fusion entre l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire) et l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire), le projet avait été une première fois soumis au Parlement sous la forme de deux amendements gouvernementaux à la loi du 22 juin 2023 visant à accélérer le déploiement du nouveau nucléaire. 

Les députés avaient rejeté l’ajout, invitant le gouvernement à déposer une loi ad hoc présentant une étude d’impact détaillée. Ce qui est désormais chose faite.

En effet l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (OPECST) avait examiné cette question et publié un rapport en juillet dernier. Dans ce rapport, il n'était pas opposé à la fusion, pourvu que des mesures soient prises pour garantir l'indépendance de la nouvelle entité.

DÉPOUSSIÉRER L’ATOME • Le choix de revenir sur une organisation prudentielle vieille de vingt ans est nécessaire, selon le gouvernement, pour faire face aux défis posés par la relance du nucléaire en France et le volume de décisions à instruire dans les années à venir. Le gouvernement vise 9,9 GW de nouvelles capacités d'ici à 2026.

Sans compter aussi que de nouveaux prospects nucléaires, comme les petits réacteurs modulaires (SMR en anglais), et l'émergence de nombreuses start-ups dans le secteur, sont autant de nouveaux défis justifiant des procédures renouvelées.

Le texte envisage aussi de relâcher les contraintes régissant les marchés publics pour les projets nucléaires.

ELECTRONS LIBRES • Le projet ne laisse pas d’inquiéter, cependant. En premier lieu, la nouvelle autorité devra garantir une séparation imperméable entre les fonctions d’expertise (aujourd’hui exercées par l’IRSN) et celles de décision (exercées par le collège de l’ASN). 

Dans une tribune parue dans Libération le 30 janvier, des chercheurs et des parlementaires expriment leur crainte quant à une possible déstabilisation majeure des deux organismes, surtout au moment où ils seront le plus sollicités.

Ensuite, la gestion risque d’être complexe, alors que la nouvelle entité devra jongler entre les statuts d’agents publics (500) et de salariés de droit privé (1600). Enfin, le calendrier s’annonce serré, l’objectif étant une entrée en vigueur du nouveau cadre au 1er janvier 2025.

FISSIONS ET FUSIONS • Le texte de loi déposé par le gouvernement est resserré. Il s’en remet, pour l’essentiel de l’exécution concrète de la fusion, au règlement de la future autorité unique, par exemple en ce qui concerne l’organisation du contrôle déontologique, qui pourrait être opéré par une commission d’éthique et de déontologie.

 En comparaison internationale, dans les 12 pays qui ont le plus de réacteurs, deux (les Etats-Unis et le Canada) ont une autorité intégrée qui réunit l’expertise et la décision. Cependant, des garanties supplémentaires sur la publicité semblent exister aux Etats-Unis, avec par exemple des retransmissions télévisées des réunions du collège de l’autorité.


Mais aussi

ENFANTS DE LA PATRIE Nous vous en parlions la semaine dernière : Gérald Darmanin a annoncé sur le tarmac de Dzaoudzi vouloir supprimer l’application du “droit du sol” sur le territoire de Mayotte. Ce mode d’acquisition de la nationalité consiste en l’acquisition automatique de la nationalité à l’âge de 18 ans pour toute personne née sur le sol français. 

Depuis 2018, le régime du droit du sol est déjà dérogatoire à Mayotte, où il ne s’applique que si l’un au moins des parents est présent régulièrement sur le territoire depuis au moins 3 mois. Sur le territoire mahorais, l’article 73 de la Constitution autorise le législateur à prévoir des lois spécifiques, inapplicables sur le reste du territoire français. 

Seulement, une suppression totale du droit du sol à Mayotte serait une dérogation si radicale que le Conseil constitutionnel y verrait une atteinte au principe d’universalité de la République et pourrait censurer le projet de loi. 

Pour l’éviter, le ministre prévoit d’engager une réforme constitutionnelle qui permette de singulariser Mayotte et d’y durcir les conditions d’accès à la nationalité. Cette idée de réforme constitutionnelle pourrait s’opérer soit par la voie d’une loi constitutionnelle, soit par celle d’un référendum. 

Dans les deux cas, hors la droite et l’extrême-droite, le soutien massif nécessaire reste à trouver pour la réforme. D’un côté, le groupe LR — qui a déjà déposé une proposition de loi constitutionnelle à l’Assemblée nationale — serait tenté d’en profiter pour réclamer la suppression du droit du sol sur tout le territoire, rendant impossible l’adoption d’un texte unique par les deux chambres, préalable nécessaire à la convocation du Congrès.

De l’autre les partis de gauche seraient insusceptibles de soutenir un texte singularisant Mayotte par la réduction des droits des immigrés sur place. 

Si la faisabilité et l’efficacité de ce durcissement restent à établir — la réforme de 2018 n’avait pas, par exemple, ralenti l’immigration sur l’île — l’annonce replace résolument le ministre sur les thèmes investis par les droites, au démarrage d’une campagne européenne marquée par la compétition entre Renaissance et le Rassemblement National.

PARIS SANS GAZON ? •  Le club parisien, attaché au Parc des Princes depuis 1974, pourrait bien s’en aller, à en croire Nasser Al Khelaifi, qui a déclaré vouloir “bouger du Parc”. 

En effet, le Conseil de Paris a refusé le principe d’une vente du stade le 6 février, considérant qu’il “appartient au patrimoine des Français”. A la gauche de la majorité du Conseil, on s'inquiétait aussi sur l’avenir du stade en cas de vente du PSG.

Le PSG, dont la Convention d’occupation du domaine public du Parc des Princes, renouvelée en 2013, court jusqu’en 2044, espérait jusqu’ici racheter l’infrastructure pour y investir 500 millions d’euros permettant l’augmentation de sa capacité pour atteindre 60.000 places, contre 48.000 aujourd’hui. 

Malgré les bons résultats de billetterie du PSG, parmi les meilleurs en Europe, et la surface financière du fonds qatari (1,5 Milliards investis depuis 2011), l’investissement nécessaire ne se fera pas, selon Nasser Al Khelaifi, sans transfert de propriété du bâti. 

A l’inverse, un désengagement du Parc serait relativement peu onéreux. Une rupture anticipée du contrat devrait représenter une indemnité comprise entre 14 et 25 millions d’euros selon les sources, soit quelques mois de salaire de Kylian Mbappe.

Mais les premières pistes pour un départ sont peu nombreuses. Le PSG a déjà renoncé au rachat du Stade de France puis de l'hippodrome de Saint-Cloud. Parmi les options restantes : la reprise du site de Montigny-le-Bretonneux — mal desservi et moins attractif pour les clients VIP — et d’autres options encore plus hypothétiques.

Le projet serait ambitieux et long. A titre de comparaison, le Parc Olympique Lyonnais, l’enceinte du club de Lyon, a ouvert ses portes en 2016, soit près d’une décennie après le lancement du projet en 2007. Le club avait dû subir de nombreuses péripéties administratives pour acquérir le terrain et lancer les travaux.

Difficile donc d'écarter la possibilité d’un bluff de la part de la direction du PSG. D’autant plus que du côté de la Mairie on semble prêt à négocier. Une vente sèche n'étant plus d'actualité après le vote du Conseil, la mairie avance l’option d’un bail emphytéotique de 99 ans avec des clauses avantageuses qui s'apparenterait presque à une vente. Le départ du PSG est donc encore loin d'être inéluctable.

CONSENSUS ET CONSENTEMENT • Le Parlement européen et le Conseil ont adopté le 6 février une version de la directive européenne sur les violences faites aux femmes finalement dépourvue de définition européenne du crime de viol. 

La version initiale du texte prévoyait d’intégrer aux “eurocrimes” de l’article 83 du TFUE un crime de viol, dont l’élément de caratérisation aurait été l’absence de consentement de la victime. 

Alors que l’adoption d’un tel texte est soumis à un principe de consensus entre les Etats membres, seuls treize d’entre eux soutenaient l’introduction du texte, dont plusieurs disposent déjà dans leurs législations nationales d’une définition fondée sur la notion de consentement. Ils ont finalement retiré leur proposition.

Parmi les pourfendeurs du texte, la France soutenait que sa définition nationale serait plus protectrice des victimes. Pourtant, la nouvelle définition créait une présomption de viol en cas de rapport non consenti, quand le régime français réserve les cas de viol aux situations où la violence, la contrainte ou la surprise peuvent être prouvées.

En outre, douze associations, dont Human Rights Watch et Amnesty, soutiennent que dans les pays ayant adopté une définition fondée sur le consentement, les signalements sont plus nombreux et les poursuites plus suivies d’effets.

En somme, le texte final — qui porte par ailleurs de nombreuses autres mesures protectrices — renonce à ouvrir largement les portes des cours criminelles aux victimes d’atteintes sexuelles, tout en conservant les régimes nationaux libres d’évoluer indépendamment. 

REMANIEMENT, SUITE ET FIN • Fin pour Amélie Oudéa-Castéra, qui quitte le grand ministère de l’éducation rejoint le 11 janvier et retourne aux Sports et aux Jeux Olympiques et paralympiques. 

Fin — du suspens — pour la fonction publique, qui aura bien son ministre de plein exercice, en la personne de Stanislas Guérini, reconduit à ses fonctions. 

Avec 35 ministres, le gouvernement Attal au complet n’est plus aussi resserré qu’il aspirait à l’être le 11 janvier, où seuls quinze ministres avaient été nommés. Il ne compte que cinq membres de moins que le gouvernement Borne 2 qui l’avait précédé.  


Nos lectures de la semaine

  • Une étude de la Fondation Jean-Jaurès fait le point sur l'accès aux soins des étrangers en situation irrégulière 

  • Le podcast anglophone Uncommon Decency interview Sylvie Kauffmann sur “l'aveuglement” Franco-Allemand vis à vis de la Russie de Poutine


Cette édition a été préparée par François Valentin, Étienne Rabotin et Ghislain Lunven de Chanrond. À la semaine prochaine !

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