Confiance, hydroélectricité, conseil des ministres franco-allemand

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Hexagone
4 min ⋅ 02/09/2025

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C’est la rentrée ! Vous n’avez pas tout suivi de l’actualité de la semaine ? C’est normal, selon François Bayrou : “tout le monde était en vacances”. Pas de panique donc, Hexagone est de retour ! Joyeux mardi, nous sommes le 2 septembre 2025, et voilà votre 75ème briefing hebdo.


Le Briefing

SLOW MOTION • Le 26 août, le Premier ministre François Bayrou a annoncé qu’il engagerait la responsabilité de son gouvernement le 8 septembre prochain devant l’Assemblée nationale, en application de l’article 49, alinéa 1 de la Constitution. 

Cette démarche prend la forme d’une déclaration de politique générale suivie d’un vote de confiance et place directement l’exécutif face à sa responsabilité politique. Si le vote de confiance est accordé, le gouvernement est confirmé ; en cas de rejet, le Premier ministre doit présenter la démission de son gouvernement au président de la République. 

Cette procédure, bien que prévue par le texte fondamental, n’a que rarement conduit à la chute d’un exécutif depuis 1958, car elle est en générale utilisée par des gouvernements disposant d’une majorité stable. Gabriel Attal avait choisi, par exemple, de ne pas y recourir. 

La déclaration de politique générale sera centrée sur la question de la dette publique et du redressement budgétaire. Le Premier ministre insiste sur l’urgence de rétablir les comptes publics et sur la nécessité d’un effort national, chiffré à environ 44 milliards d’euros, afin de préserver l’indépendance financière du pays. 

Les oppositions ont d’ores et déjà annoncé qu’elles voteraient contre la confiance, qu’il s’agisse de la gauche, du Rassemblement national ou même du Parti socialiste, qui jusqu’ici avait permis le maintien de François Bayrou à Matignon.

À Blois, lors de son université d’été, le Parti socialiste a présenté son propre programme économique. Ce contre-budget vise à réduire le déficit public de 21,7 milliards d’euros en 2026, soit moitié moins que l’effort annoncé par le gouvernement. 

Pour y parvenir, le PS prévoit 26,9 milliards de recettes nouvelles et 14 milliards d’économies. Le plan est complété, en dépenses, par l’annonce d’un effort d’investissement de 19 milliards d’euros. Parmi les mesures les plus emblématiques par ailleurs, on note la suspension de la réforme des retraites, la création d’une taxe sur les patrimoines (sur le modèle de la “taxe Zucman”) ou encore une baisse de la CSG. 

Mais aussi


REFAIRE BARRAGE Jeudi dernier, le Premier ministre a annoncé par un communiqué de presse avoir obtenu un compromis avec la Commission européenne, qui devrait mener à la clôture de deux procédures de sanction ouvertes contre la France concernant la gestion de ses barrages hydroélectriques. 

Deux procédures opposent la France à la Commission : l’une concernant la position dominante d’EDF sur le marché, l’autre concernant la non-remise en concurrence d’un grand nombre de concessions hydroélectriques arrivées à échéance. 

Parmi les négociateurs, un duo de députés a joué un rôle majeur : Marie-Noëlle Battistel (Socialistes, Isère) et Philippe Bolo (Démocrates, Maine-et-Loire), qui avaient produit en mai 2025 un rapport d’information parlementaire sur ces deux procédures. (lire le rapport par ici)

La principale innovation apportée par le compromis annoncé est le passage des grosses installations à un régime d’autorisation quelque peu aménagé, actuellement réservé aux installations de moins de 4,5 MW. 

Pour rappel, deux modes de gestion principaux existent aujourd’hui pour les barrages : 

  • Le régime concessif concerne les installations de plus de 4,5 MW : l’État reste propriétaire des ouvrages et délègue pour plusieurs dizaines d’années l’exploitation à un concessionnaire comme EDF ou la Shem. A la fin de la concession, les biens reviennent à l’Etat, quel que soit le montant d’investissements réalisés par l’exploitant ;

  • Le régime de l’autorisation concerne les barrages de moins de 4,5 MW : l’exploitant est propriétaire de son infrastructure, et l’exploite sous réserve du respect des prescriptions de son autorisation environnementale, comme une installation classée “classique”. 

Le passage à un régime commun d’autorisation, et de sortie du modèle concessif (sauf exceptions) aurait pour avantage, du point de vue des exploitants, d’assouplir la gestion hors du cahier des charges de l’Etat et d’inciter aux investissements, puisque l’exploitant serait au moins partiellement propriétaire. C’était le souhait d’EDF, récemment réaffirmé par son nouveau PDG, Bernard Fontana (Hexagone vous en parlait en mai dernier).

La Commission semble voir dans cette privatisation partielle des installations un remède suffisant à la situation de blocage concurrentiel qu’elle tente de dénouer depuis plus de dix ans. 

La formalisation de ce nouveau régime devrait prendre la forme d’une proposition de loi modifiant l’art. L. 511-5 du code de l’énergie qui fixe le seuil de mise en concession des barrages, proposition qui devrait être présentée “prochainement” par des députés.

En revanche, plusieurs parlementaires s’opposent par avance à la transition vers ce régime, qui pourrait fragiliser le contrôle de l’Etat sur les infrastructures stratégiques que sont les barrages en matière de sécurité, de protection des milieux aquatiques, et de protection de technologies de pointe.


TOULON TROP COURT • Le Conseil des ministres franco-allemand qui s’est tenu la semaine passée à Toulon a mis en lumière un partenariat solide, comme le veut l’exercice devenu traditionnel, mais traversé par des zones de friction et des enjeux encore ouverts. 

Si Emmanuel Macron et Friedrich Merz ont affiché (voir ici la conférence de presse) leur volonté de relancer la dynamique bilatérale, la teneur des discussions et le détail des « feuilles de route » (entendre : textes non contraignants de doctrine commune) adoptées révèlent une négociation plus serrée qu’il n’y paraît.

Parmi les huit feuilles de route signées, celle sur l’énergie s’est particulièrement démarquée. La France a obtenu un position commune accordant un principe de « non-discrimination » à l’égard du nucléaire, qui pourrait alors être reconnu comme éligible aux financements européens au même titre que les autres technologies bas-carbone. 

Ce compromis, fruit de longs débats, vise à sortir d’une impasse tout en préservant les intérêts allemands très réservés sur cette filière. Les discussions ont également porté sur l’autonomie énergétique à horizon 2050, avec la promesse d’une vision commune et de projets collaboratifs sur les réseaux de transport d’énergie.

Les autres feuilles de route concernent la souveraineté numérique, le soutien à l’innovation industrielle – notamment dans les secteurs critiques comme l’acier ou l’automobile –, la simplification réglementaire européenne, et l’union des marchés de capitaux. Un accent particulier est mis sur la défense des intérêts industriels européens, avec la préférence européenne dans la commande publique qui, jusqu’ici, faisait débat.

Le volet défense, rapidement abordé, laisse planer des incertitudes  : si le projet SCAF (système de combat aérien du futur) reste officiellement à l’agenda de la coopération, le groupe Dassault a exprimé ses doutes sur la viabilité du programme, illustrant les limites d’une entente dont certains voeux pieux restent soumis à des aléas techniques et pragmatiques.


NOS LECTURES DE LA SEMAINE

  • Le rapport de l’Institut Montaigne sur l’accès à la propriété immobilière en France. Alors que la puissance publique consacre 40 milliards d’euros par an aux politiques du logement (1,5% du PIB, deux fois plus que la moyenne de l’UE), l’objectif de 73% des Français de devenir propriétaire avant la retraite est de plus en plus difficilement réalisable. Face à ce problème, l’Institut Montaigne propose 10 recommandations, de la dynamisation des établissements publics fonciers au recours sous des formes diversifiées et innovantes au viager.


Hexagone est rédigé par Étienne Rabotin et Ghislain Lunven, avec l’appui de Noé Viland. À la semaine prochaine !

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