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Le week-end était long et vous n’avez pas tout suivi de l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là. Joyeux mardi, nous sommes le 29 avril 2025, et voilà votre 63ème briefing hebdo.
Disclaimer : puisque vous suivez l’actualité, vous avez peut-être entendu parler d’un organisme appelé “Hexagone - la France en chiffres”, se présentant comme un “observatoire statistique”, commanditaire d’un sondage Ifop sur l’élection présidentielle 2027.
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Invité ce mardi soir à 20h10 sur TF1, Emmanuel Macron devrait clarifier les intentions de l’exécutif en matière de consultations de la population par référendum dans les mois à venir. Dans une émission au format inédit, dans lequel il débattra avec des personnalités médiatiques ou politiques comme le youtubeur Tibo Inshape ou la journaliste Salomé Saqué (Blast), il pourrait avoir l’occasion d’annoncer un scrutin de ce type, déjà évoqué lors de ses vœux de décembre.
Le 4 mai, dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, le Premier ministre François Bayrou a annoncé son intention de soumettre à référendum la question de l’équilibre des finances publiques. Le projet de référendum, qui porterait sur une ou deux questions simples et normatives, viserait à faire émerger une forme de consensus national sur les efforts à consentir pour restaurer la soutenabilité des comptes publics.
Miniature d’une vidéo de Tibo Inshape sur YouTube - “JE MANGE COMME EMMANUEL MACRON”
(déc. 2023)
La forme et la teneur de cet éventuel référendum porte à interrogation : faire adopter une loi de finances par la voie du référendum de l’article 11 de la Constitution serait une innovation risquée, puisque cet article 11 restreint le champ du référendum aux projets de loi portant sur “l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent".
Il n’est donc pas certain qu’une loi de finances entre dans ces critères. Resterait alors à savoir de quelle façon le Conseil constitutionnel pourrait contrôler la régularité du scrutin.
Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a précisé le 11 mai, à l’occasion de l’émission Le Grand Jury RTL-Public Sénat-Le Figaro, que l’organisation matérielle d’un tel référendum sur les finances publiques coûterait entre 100 et 200 millions d’euros. Cette estimation varie selon qu’il s’agirait d’un scrutin entièrement dématérialisé (coût estimé à 100 millions) ou d’un vote avec bulletin papier (proche de 200 millions).
Par ailleurs, le ministre de l’Intérieur a souligné que, compte tenu des délais logistiques incompressibles — notamment pour la coordination avec les communes, la mise en œuvre de la propagande électorale et l’encadrement juridique du scrutin — un tel référendum ne pourrait raisonnablement avoir lieu avant l’été. Il serait envisageable à l’automne, avec deux ou trois questions maximum, chacune formulée de façon claire et ayant une portée législative.
D’autres questions pourraient également être soumises au référendum par la même occasion, sur des sujets d’écologie ou de services publics. Certains au gouvernement, comme Bruno Retailleau, appellent de leurs vœux un référendum sur les politiques d’immigration.
En outre, cette annonce est intervenue alors même qu’Emmanuel Macron avait lui-même révélé, dès le 2 mai, son intention de lancer une consultation citoyenne portant sur « les temps de l’enfance », via une convention citoyenne annoncée pour le mois de juin.
Hexagone soutient (non rémunéré) :
L’association Les Ombres agit pour enrayer la spirale de pauvreté qui touche les 400 000 jeunes confiés à l’ASE chaque année, en s’engageant pour leur orientation scolaire et leurs objectifs professionnels.
Ce jeudi 15 mai, l’association organise une grande soirée de soutien, de présentation de son action et de célébration de ses succès. Au programme : présentations, cocktail, projection, concert… de 20h à 2h.
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UNION DANS L’UNION • Le 9 mai 2025, la France et la Pologne ont conclu un traité bilatéral de coopération stratégique, signé à Nancy, comportant une clause d’assistance mutuelle explicite en cas d’agression armée. Le texte stipule une mobilisation possible de moyens militaires, dans un cadre juridiquement articulé avec l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord et l’article 42.7 du traité sur l’Union européenne, mais avec un objectif d’opérationnalisation bilatérale plus directe et réactive.
Sur le plan capacitaire, la France s’engage à projeter environ 5 000 militaires en Pologne en moins de 30 jours, en cas d’agression armée, avec une montée en puissance vers une capacité de projection de 10 000 à 12 000 hommes d’ici 2027.
Ce nouveau traité s’inscrit dans le dur souvenir des failles stratégiques mises en lumière par l’échec de la dernière alliance franco-polonaise de ce type, qui avait échoué en 1939 à déclencher une réponse adéquate française, tout en intégrant les enseignements opérationnels de la guerre en Ukraine.
Le traité comprend également une clause implicite d’extension à la dissuasion nucléaire française, par l’invocation de la « solidarité dans toutes ses composantes ». Bien qu’aucune référence explicite ne figure dans le texte, l’ambiguïté stratégique est assumée, conformément à la doctrine française de dissuasion.
Sur le plan industriel, la Pologne s’engage à « promouvoir progressivement » la préférence européenne dans ses futurs programmes d’armement. Cette disposition pourrait réorienter une part significative des investissements polonais vers les industriels européens, en particulier français, alors que Varsovie s’est massivement tournée vers les États-Unis et la Corée du Sud depuis 2022, tant sur le plan des fournitures en armement que de la construction de centrales nucléaires.
Enfin, un accord parallèle sur le nucléaire civil a été signé. Il intervient dans le cadre du programme polonais de développement de l’atome, avec un second appel d’offres prévu d’ici 2040. La France espère y positionner EDF en alternative au consortium américano-coréen actuellement favori.
DÉSERTS MÉDICAUX • Jeudi 8 mai, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture, par 99 voix contre 9, une proposition de loi transpartisane portée par le député Guillaume Garot (PS) visant à lutter contre les déserts médicaux. Ce texte introduit une mesure phare : la régulation de l’installation des médecins, rejetée par le gouvernement et dénoncée par une large partie de la profession.
L’article central conditionne l’installation des médecins libéraux ou salariés à l’accord préalable de l’ARS locale.
Dans les zones sous-dotées, l’autorisation est de droit, alors que dans les zones mieux pourvues, le départ préalable d’un confrère sera requis. Un « indicateur territorial », tenant compte du temps médical disponible par patient et des données démographiques et socio-économiques, doit objectiver ce zonage.
Selon les promoteurs du texte, cette régulation ne concernerait que 13 % du territoire national.
Parallèlement, la proposition supprime la majoration tarifaire pour les patients sans médecin traitant, rétablit l’obligation de participation à la permanence des soins et prévoit l’ouverture d’une première année de médecine dans chaque département.
Le gouvernement, opposé à une contrainte à l’installation, n’a pas réussi à empêcher l’adoption du texte, mais mise de son côté sur un dispositif incitatif présenté dans le « plan déserts médicaux » en avril dernier, contenant notamment une obligation jusqu’à deux jours de consultation par mois dans les zones en tension.
Il n’est pas garanti que le texte passera l’étape du Sénat, devant lequel un texte concurrent est débattu depuis ce lundi. Porté par Philippe Mouiller (LR), il entend renforcer les prérogatives des collectivités territoriales dans la planification de l’offre de soins.
La procédure accélérée a été déclenchée, et ce texte pourrait devenir le véhicule législatif du gouvernement. La convergence ou le conflit entre les deux chambres conditionnera l’architecture finale de la réforme.
NOUVELLE-CALEDONIE • Après trois jours de pourparlers intenses en Nouvelle-Calédonie, le ministre des Outre-mer Manuel Valls n’a pas réussi à aboutir à un accord entre les différentes parties réunies autour de la table pour discuter de l’avenir et du statut institutionnel de l’archipel.
Un projet du gouvernement qui proposait un transfert des compétences régaliennes à la Nouvelle-Calédonie, sous délégation française, a été rejeté par par les non-indépendantistes radicaux qui l’ont jugé trop proche d’une indépendance.
Ces derniers ont proposé en revanche une partition du territoire : un statut d’indépendance-association pour les provinces Nord et des Îles, et un maintien dans la République pour la province Sud. Cette proposition, contraire au principe constitutionnel d’unité calédonienne, a été tout autant refusée par les indépendantistes, notamment en raison de la forte population kanak résidant dans la province Sud.
Face à ce blocage, Manuel Valls a acté l’échec de la mission, tout en annonçant la mise en place d’un comité de suivi, sans perspective immédiate de sortie de crise.
L’impasse politique intervient à un moment critique : les élections provinciales doivent se tenir d’ici au 30 novembre 2025. Ce scrutin, déterminant pour la composition du Congrès et du gouvernement local, s’annonce à haut risque.
En cause, la persistance d’un corps électoral gelé, hérité des accords de Nouméa, qui exclut environ 20 % de la population du droit de vote. Ce système, déjà à l’origine des émeutes meurtrières du 13 mai 2024, reste source de grandes tensions.
Cette situation ouvre la voie à un nouveau rapport de force. Si les indépendantistes, qui se sont montrés majoritaires lors des législatives de 2024 dans un scrutin pourtant national, mobilisent fortement leur électorat, ils pourraient remporter la majorité au Congrès et au gouvernement local, modifiant ainsi profondément l’équilibre des négociations futures.
Une histoire de la diplomatie française en 4 épisodes de podcast, avec Xavier Mauduit dans “Le cours de l’histoire” sur France Culture
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Hexagone est rédigé par Étienne Rabotin et Nicolas de Renghien, avec l’appui de Noé Viland. À la semaine prochaine !