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Le week-end a été long et vous n’avez pas tout suivi de l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là ! Joyeux mardi, nous sommes le 25 novembre 2025, et voilà votre 86e briefing hebdo !
Le Parlement avait adopté le 15 octobre dernier une “loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement”, issue d’une proposition du député Harold Huwart (groupe LIOT). Le Conseil constitutionnel a censuré un bon nombre de cavaliers législatifs et quelques dispositions stratégiques du texte.
Hexagone revient sur deux dispositifs importants du texte, l’un rejeté pour inconstitutionnalité, l’autre validé, et qui promet des remous dans le contentieux de l’urbanisme.
Une maison, jeune bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme, en 1984 © INA
SEE YOU IN COURT • Le but affiché de la proposition de loi Huwart était de soulager les acteurs de la construction et du logement, y compris les collectivités, pour permettre de sécuriser plus rapidement les projets de construction.
Un des axes privilégiés pour ce faire était l’encadrement (euphémisme pour “réduction”) des possibilités de recours de tiers contre les autorisations d’urbanisme octroyées par les collectivités.
Le Conseil constitutionnel a validé un dispositif important dans ce sens : celui de l’article 26, 7° de la loi. Il modifie l’article L.600-12-2 du code de l’urbanisme pour réduire le délai de recours contre les décisions d’urbanisme et met fin au principe selon lequel un recours gracieux proroge le délai pour introduire un recours contentieux.
Autrement dit, le recours amiable deviendrait beaucoup moins utile au requérant, qui en toute logique sera incité à se tourner directement vers les tribunaux pour contester les autorisations d’urbanisme. Résultat : des délais raccourcis entre la décision de la collectivité et l’aboutissement du recours.
Pourtant, le Conseil d’Etat mettait en garde dans son avis sur le projet de loi contre un effet potentiel pervers de cette mesure : puisque les requérants seront moins tentés par le recours amiable, qui permettait pourtant de déminer certains contentieux avant le recours au juge, ils seront maintenant incités à ouvrir systématiquement des contentieux, à rebours des efforts engagés pour désengorger les tribunaux.
RECOURS TROP COURT • Parallèlement, le Conseil constitutionnel censure le 4° du même article 26 de la loi, qui prévoyait d’empêcher un grand nombre de tiers de faire un recours contre les documents d’urbanisme (les PLU, SCOT, SRADDET et autres joyeusetés).
L’article adopté au parlement prévoyait d’interdire qu’une personne ne serait recevable à agir contre une décision d’urbanisme que si elle avait pris part à l’enquête publique ou participé à l’élaboration de ce document.
Certes, reconnaît le Conseil constitutionnel, limiter le droit à un recours effectif (qui est un droit constitutionnel) peut servir l’intérêt général en empêchant les recours abusifs ; l’arrêt va même jusqu’à mentionner le “risque d’incertitude juridique” lié aux recours, comme si ce risque provenait du recours lui-même et non de la légalité du document en cause.
Mais, tranche-t-il, la loi portait une atteinte disproportionnée à ce droit au recours, tant l’effort demandé au requérant serait important. Comme le fait remarquer le professeur A. Gossement dans un commentaire éclairant, il aurait fallu, pour être recevable, anticiper pour chaque document d’urbanisme, au stade de l’enquête publique, la légalité d’une décision qui par définition n’est pas finalisée, le tout en se constituant des preuves de sa participation, étant précisé que tous les documents d’urbanisme auraient été concernés.
La loi, allégée d’une douzaine de cavaliers législatifs et de ces dernières dispositions, devrait être promulguée sous peu.
ACIER DISCUTÉ • La commission des Finances de l’Assemblée nationale a adopté la semaine passée une proposition de loi LFI visant à nationaliser les activités françaises d’ArcelorMittal.
Présentée par la députée Aurélie Trouvé avec le soutien de la gauche, cette initiative cherche à « sauver la sidérurgie » et financer la décarbonation du secteur, après l’annonce d’un plan social de suppression de 600 postes en France en avril dernier.
Le coût de la nationalisation est estimé à 3 milliards d’euros.
Selon le président actuel d’ArcelorMittal France, changer l’actionnaire ne résoudrait pas les problèmes structurels, et que la “découpe” des actifs d’ArcelorMittal en France aggraverait leur situation.
La baisse de la demande européenne et l’importation d’acier extra-européen sont des obstacles majeurs à la performance de la sidérurgie, qui ne seront pas directement levés par la nationalisation. Cependant, des investissements publics pourraient rediriger l’entreprise vers la décarbonation, mise en pause depuis 2024, et lui faire conserver les emplois français.
Adopté en commission grâce à l’abstention du RN malgré l’opposition de la droite et du centre, la proposition de loi doit être examinée en séance publique le 27 novembre, alors que le RN a déposé, avec ses alliés de l’UDR, plus de 270 amendements pour faire obstruction à son adoption pendant la journée de “niche” du groupe LFI.
Ne quittez pas : Hexagone reprend après ce message sponsorisé du CNAM :
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INÉGALITÉS AU SOMMET • L’Insee a publié le 18 novembre une étude France, Portrait social s’appuyant sur les données du fichier Pote (pour fichier permanent des occurrences et traitement des émissions) de la DGFiP.
L’Insee montre dans cette étude une hausse importante des revenus des 0,1 % de Français les plus riches. Ces 40 700 foyers, principalement situés en Île-de-France, déclarent en moyenne 1 million d’euros par an, soit 167 fois le revenu du quart des ménages les plus modestes. Ce groupe tire l’essentiel de ses revenus des dividendes et des placements financiers, et non du travail. Les données couvrant vingt ans montrent une augmentation volatile mais continue, avec une progression de 119 %, bien supérieure à celle du reste de la population.
L’étude souligne que plusieurs chocs économiques ont rythmé cette évolution, mais aussi que la fiscalité a amplifié le phénomène. Sous le mandat de François Hollande, l’intégration des revenus du capital dans l’impôt sur le revenu avait temporairement réduit les dividendes déclarés. À l’inverse, la « flat tax » instaurée par Emmanuel Macron en 2018 a stimulé la remontée des revenus financiers. Résultat : les très hauts revenus se sont envolés, tandis que le taux moyen d’imposition des 0,1% sur leurs revenus a baissé, passant de 29,2 % en 2003 à 25,7 % en 2022.
Il faut souligner que cette étude s’arrête à l’année 2022, soit avant l’adoption par l’Assemblée nationale de la contribution différentiel sur les hauts revenus, dont le produit devrait s’élever à 1,4 milliards d’euros sur l’exercice 2025.
TEMPS DE L’ENFANT • La Conseil économique, social et environnemental (CESE) a lancé en juin 2025 la Convention citoyenne sur les temps de l’enfant, composée de 130 citoyens tirés au sort. Leur mission, répondre à cette question : « Comment mieux structurer les différents temps de la vie quotidienne des enfants afin qu’ils soient plus favorables à leurs apprentissages, à leur développement et à leur santé ? ».
Le rapport final, remis le 23 novembre 2025, contient 20 propositions détaillées pour refonder l’organisation des temps scolaire, périscolaire et familial.
Parmi les mesures préconisées, trois grands axes se dégagent. D’abord, la structuration des rythmes : retour à une semaine de cinq jours de classe, des journées de cours débutant autour de 9 h, et des cours raccourcis à 45 minutes dans le secondaire.
Ensuite, l’élargissement du « socle commun » d’apprentissages pour y inclure des activités pratiques, artistiques, culturelles et sportives, et une alternance matin théorique / après-midi pratique.
Enfin, l’organisation des temps hors-classe, avec des vacances mieux réparties (deux zones au lieu de trois) et un allégement des transports et trajets pour limiter les contraintes chronobiologiques des enfants
Ces recommandations visent à promouvoir un modèle centré sur les besoins biologiques et cognitifs des enfants. Les citoyens de la convention ont souligné que beaucoup d’enfants ne bénéficient pas d’un cadre adapté à leur rythme et que le système actuel entretient les inégalités.
Pour qu’elles soient efficaces, les mesures devront s’accompagner d’un suivi, d’un engagement politique et d’un financement pérenne.
Comme chaque semaine et en tout temps, relisez quelques grands arrêts de la jurisprudence administrative (Dalloz, actuellement dans sa 25ème édition - pensez y pour remplir les chaussettes sous le sapin).
Hexagone est rédigé par Étienne Rabotin et Ghislain Lunven. À la semaine prochaine !
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