Budget, Bande organisée, Algérie et Drones

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Hexagone
5 min ⋅ 04/11/2025

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Le week-end a été long et vous n’avez pas tout suivi de l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là ! Joyeux mardi, nous sommes le 4 novembre 2025 et voilà votre 84e briefing hebdo !


Le Briefing : 

Vous n’avez pas pu tout suivre des débats et rebondissements en séance à l’Assemblée sur le budget ? Pas de problème, on vous fait un récap de la situation. 

Plusieurs mesures phares ont été adoptées contre l’avis du gouvernement lors de la première semaine d’examen en séance de la première partie du PLF, celle consacrée aux recettes. 

Puisque c’est la saison du budget, encore une vue de Bercy, sous un autre angle qu’il y a deux semaines.

IDÉES DE RECETTES • Les députés ont approuvé la défiscalisation totale des heures supplémentaires, supprimant le plafond de 7 500 euros. Ils ont aussi validé la défiscalisation des pensions alimentaires pour les bénéficiaires, plafonnée à 4 000 euros par enfant et 12 000 euros par an, tout en fiscalisant celles versées. La gauche a obtenu la création d’un crédit d’impôt pour les frais d’Ehpad, afin que les ménages non imposables bénéficient enfin de l’aide fiscale réservée jusque-là aux contribuables.

Sur le patrimoine, une alliance entre PS, RN et MoDem a transformé l’IFI en impôt sur la fortune improductive, incluant biens de luxe, actifs numériques, assurance-vie non investie et yachts, mais excluant la résidence principale. Parallèlement, les députés ont voté une hausse de la taxation sur les rachats d’actions, portée à 33 %, censée rapporter 8 milliards d’euros, et une taxe exceptionnelle sur les superdividendes.

PÊCHE AU GROS • La fiscalité des grandes entreprises est aussi au centre des débats. LFI a fait adopter un impôt sur les bénéfices des multinationales proportionnel à leur activité dans l’Hexagone, chiffrée à 26 milliards de rendement, mais contraire à 125 conventions fiscales signées par la France selon Bercy, et, par conséquent, inapplicable. 

Les députés ont également élargi le champ d’application de la taxe minimum de 15 % sur les profits des multinationales, en abaissant le seuil de 750 à 500 millions d’euros de chiffre d’affaires. 

La taxe Gafam a été doublée, passant de 3 % à 6 %, malgré les avertissements du ministre de l’économie Roland Lescure sur d’éventuelles représailles américaines. La taxe sur les holdings patrimoniales, voulue par le gouvernement, a été profondément édulcorée sous l’impulsion de Laurent Wauquiez : le seuil de détention a été relevé à 50 % et l’assiette restreinte. Dans le même esprit, les députés ont prolongé la contribution sur les hauts revenus, qui fixe un taux minimal d’imposition de 20 % au-delà de 250 000 euros annuels, jusqu’à ce que le déficit repasse sous les 3 %.

SANS POURCENTS • En revanche, plusieurs mesures symboliques ont été rejetées. La taxe Zucman sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros a été refusée, tout comme sa version allégée proposée par le PS. 

L’amendement de LFI pour instaurer un impôt universel ciblé contre l’exil fiscal a échoué à une voix près. Le gel du barème de l’impôt sur le revenu, censé rapporter deux milliards, a également été rejeté par une large coalition, de l’extrême gauche au RN.

Côté PLFSS, examiné en commission cette semaine, le Premier ministre a concédé le dégel des pensions de retraite et des minima sociaux dans le budget de la Sécurité sociale, pour tenter de rallier une partie du PS. 

L’exécutif mise désormais sur le Sénat ou la commission mixte paritaire pour reprendre les mesures qu’il juge inopérantes ou anticonstitutionnelles, comme la taxe Gafam à 6 % ou l’impôt sur les multinationales.

Mais aussi


EN BANDE ORGANISÉE • Le Conseil d’Etat a validé, par un arrêt du 28 octobre dernier, la légalité du décret d’application de la loi du 13 juin 2025, qui prévoit la possibilité d’affecter certains détenus condamnés pour des faits de crime organisé dans des quartiers particuliers, et réunis dans certains centres pénitentiaires, comme celui de Vendin-le-Vieil.

Saisi par l’association des avocats pénalistes, le juge administratif a notamment considéré que les restrictions du droit de parloir, la suppression de l’accès aux unités de vie familiale, ou la réduction des accès au téléphone, étaient justifiées par l’objectif recherché, à savoir la rupture des liens avec les réseaux criminels. 

Surtout, la motivation de la mesure d’affectation à un “QLCO” (quartier de lutte contre la criminalité organisée) a semblé suffisamment exigeante au Conseil d’Etat, qui précise qu’elle devra être fondée sur les mêmes motifs que ceux qui justifient la procédure de poursuites propre à ce type de criminalité, qui existe déjà aux article 706-73 s. du code de procédure pénale. 

 Au demeurant, le Conseil constitutionnel avait déjà jugé conforme la partie législative du dispositif, par une décision 2025-885 DC de juin dernier. 

L’ouverture de trois de ces QLCO à Valence, Aix et Réau avait été annoncée mi-octobre par le ministre Darmanin, pour y placer entre 500 et 700 détenus, alors que celui de Vendin-le-Vieil en compte déjà 90.


68 ANNÉE POLÉMIQUE • Pour la première fois, un texte proposé par le Rassemblement national a été adopté, et ce à une voix près ; il s’agit d’une résolution non contraignante sur un thème cher au parti lepéniste, puisqu’elle consiste à appeler le gouvernement à dénoncer les accords franco-algériens de 1968.

Ceux-ci régissent notamment les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants algériens en France. Ces accords fixent un régime dérogatoire pour les ressortissants algériens en matière de séjour, de travail et de circulation en France.

Renégocié plusieurs fois depuis 1968, leur caractère dérogatoire au droit commun fait que le régime applicable aux Algériens est en quelque sorte figé à celui qui avait été fixé en 2002 sous Jacques Chirac ; aucune de la demi-douzaine de réformes du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile adoptées depuis ne leur sont applicables.

Il présente donc un certain nombre de dérogations favorables aux Algériens, d’autant que la loi est devenue plus stricte pour les autres étrangers.

Le texte a recueilli 185 voix pour et 184 contre. Il a été soutenu par le RN, les Députés Républicains (DR), plusieurs élus du groupe Horizons, et quelques non-inscrits. 

Laurent Wauquiez (DR) a justifié le soutien de la droite en affirmant qu’il n’y avait « aucune raison de ne pas voter un texte que nous partageons ». Le Premier ministre Sébastien Lecornu a rappelé que la politique étrangère relevait du président de la République, tout en promettant une renégociation de l’accord de 1968.

 


DRONES D’AMBIANCE • Niché au beau milieu d’un projet de loi en préparation dans les cartons du gouvernement, le sujet des drones policiers pourraient bientôt reprendre leur envol dans l’hémicycle. A l’occasion de la publication de l’avis du Conseil d’Etat sur ce projet de loi, on apprend en effet que le gouvernement prévoit de modifier l’article L. 242-6 du Code de la sécurité intérieure, qui autorise pour l’instant l’usage de drones aux seuls cas de prévention des risques naturels et aux secours. 

Or, le projet de loi relatif aux compétences des polices municipales et des gardes-champêtres, présenté début septembre au Conseil d’Etat, prévoit d’autoriser la police municipale à recourir aux drones pour la constatation des infractions aux arrêtés du maire, la surveillance des rassemblements exposés à des troubles, et la protection des bâtiments publics. 

Une tentative d’autorisation législative de ces “caméras aéroportées sans pilotes” avait échoué en 2021, lorsque le Conseil constitutionnel avait censuré des dispositions de la loi “sécurité globale préservant les libertés” (Déc. 2021-817 DC) et de la loi “Responsabilité pénale et sécurité intérieure” (Déc. 2021-834 DC). 

Il avait alors jugé que le recours aux drones n’était pas suffisamment subordonné à des conditions de risques graves à l’ordre public, et que rien n’encadrait la transmission des données ni le contingentement des appareils. 

Le nouveau projet, pour répondre à ces critiques, soumet l’emploi des drones à autorisation préfectorale temporaire, sur demande du maire, et sur un périmètre précis. Sous ces réserves, il lui est octroyé un avis favorable.


Nos lectures de la semaine

  • L’arrêt Morsang-sur-Orge du Conseil d’Etat, dont on fêtait les trente ans cette semaine, et qui vous servira forcément si vous passez bientôt les oraux du CRFPA !


Hexagone est rédigé par Étienne Rabotin et Ghislain Lunven. À la semaine prochaine !

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