Vieux, Budget de la sécu, et Start-up

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Hexagone
5 min ⋅ 09/12/2025

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Le week-end a été long et vous n’avez pas tout suivi de l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là ! Joyeux mardi, nous sommes le 9 décembre 2025, et voilà votre 88e briefing hebdo !


Le Briefing : 

La Cour des comptes a publié la semaine passée un rapport “Démographie et finances publiques”, sujet qu’elle juge sous-estimé par les pouvoirs publics, malgré une fécondité à 1,62 enfant par femme en 2024 et un allongement de l'espérance de vie.

La France vieillit : la part des 65 ans et plus dans la population passe de 16,3% en 2005 à 21,8% fin 2024, tandis que celle des moins de 20 ans baisse de 24,8% à 22,9%. Pour 100 actifs de 20-64 ans, on compte 41 jeunes et 39 seniors. 

La télé d’avant, où les mamies étaient heureuses. ©INA/Miskintélé

BATTRE EN RETRAITE • Le rapport reprend le scénario central de l'INSEE, dans lequel les 65 ans et plus atteindront 30% de la population en 2070, la population active (20-64 ans) reculant de 38 millions en 2024 à 34,6 millions, soit 50% du total contre 55,3% en 2023. Cette évolution pèse sur le potentiel de croissance et accentue le besoin d'améliorer le taux d'emploi. 

Le vieillissement de la main-d'œuvre risque de freiner la productivité, les seniors de 55-64 ans accédant moins à la formation continue (35% contre 57% pour les 18-44 ans). Les seniors épargnent davantage par précaution, favorisant des actifs sûrs au détriment des investissements risqués.

RECETTES DE GRAND-MERE • La réduction de la population active érode les recettes fiscales, les prélèvements obligatoires reposant sur la taxation des actifs. Les 20-39 ans financent 39% de leurs revenus en protection sociale via cotisations, contre 25% pour les 65 ans et plus.

L'immigration, concentrée dans les âges actifs, offre une contribution nette neutre ou légèrement négative en raison d'une intégration incomplète sur le marché du travail.

VIEUX MONDE • Selon le rapport, les dépenses sensibles au vieillissement représentent plus de 40% de la dépense publique en 2023, en hausse de 11 points depuis 1998 : les retraites, la santé, la dépendance, devraient mécaniquement augmenter. Mais symétriquement, la baisse de natalité allège déjà les dépenses d’éducation primaire et secondaire. 

À dépenses par tête constantes, le ratio dépenses publiques/PIB atteindrait 60,8% en 2070 ; maintenir les 57% actuels impliquerait de réduire uniformément les dépenses publiques de 6,1% par habitant.

C’EHPAD DU LUXE Sans lien organique avec ce rapport, mais avec un réel sens du timing, le gouvernement a décidé d’agir en augmentant, via le PLFSS, le taux de la CSG sur certains revenus du capital, pour générer 1,5 Milliards d’euros annuels fléchés vers la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), principale organisatrice de l’aide aux personnes âgées et handicapées. Cette mesure devrait combler en grande partie le déficit anticipé de 1,7 milliard d'euros de la CNSA en 2026, elle qui est déjà financée à 90% par la CSG.

C’est d’ailleurs tout le système de financement du maintien à domicile qui pourrait être modifié sous peu : le Premier ministre a annoncé un projet de loi sur la décentralisation pour le début d’année, qui pourrait transférer aux départements cette compétence, compétence financée par un reversement d’une part de la CSG… qui n’irait plus à la CNSA.  


Mais aussi

LUEUR D’APPROBATION • L’adoption vendredi dernier du volet recettes du PLFSS a constitué un tournant dans l’examen du budget de la Sécurité sociale, et peut-être pour les textes financiers dans leur ensemble (PLF et PLFSS). Malgré une majorité fragile, les députés ont approuvé cette première partie à 166 voix contre 140, avec 32 abstentions, évitant ainsi un rejet qui aurait entraîné la chute de l’ensemble du texte et bloqué toute discussion sur la partie dépenses. Cette adoption a été permise par un vote convergent de Renaissance, du MoDem, des socialistes et du groupe LIOT, tandis que Les Républicains et Horizons se sont surtout abstenus, seuls quelques députés de ces groupes votant pour.

Sur le fond, le volet recettes a fait l’objet d’intenses négociations, notamment autour de la hausse de la CSG sur les revenus du patrimoine. Un amendement de compromis a été adopté : maintien du taux de 9,2 % sur certains revenus du capital et création d’une contribution pour l’autonomie portant sur les produits d’épargne financière, avec un rendement attendu de 1,5 milliard d’euros — moins que les 2,8 milliards initialement envisagés. Le gouvernement a fait des concessions, en renonçant par exemple au doublement des franchises médicales.

Cette ligne de compromis met toutefois en lumière les tensions internes à la majorité élargie. Le groupe Horizons, conduit par Édouard Philippe, refuse toute hausse d’impôts et a fait explicitement savoir qu’il ne pouvait voter pour le projet dans son état actuel. 

Le compromis CSG n’a été accepté par Horizons qu’avec la garantie que son produit financerait strictement l’autonomie, sans contribuer à la suspension de la réforme des retraites. Cette retenue fait peser une incertitude sur le vote final, alors même que le parti socialiste, par l’intermédiaire de Boris Vallaud, a annoncé qu’il voterait pour le texte.

L’enjeu est d’autant plus crucial que le vote solennel sur l’ensemble du PLFSS, prévu aujourd'hui mardi 9 décembre, aura lieu en séance plénière au complet, ce qui rend le résultat plus incertain que celui du vote de vendredi, marqué par un fort absentéisme. Une abstention d’Horizons et des Républicains pourrait ne pas suffire pour que le texte passe ; un vote contre ferait a priori chuter le texte. En cas d’échec, le projet devrait repartir au Sénat, hypothèse qui rendrait quasi impossible l’adoption avant le 31 décembre et ferait mécaniquement dériver le déficit de la Sécurité sociale vers 30 milliards d’euros.

Face à cette pression, le Premier ministre Sébastien Lecornu a réaffirmé avec force son engagement à ne pas recourir au 49.3 sur les textes financiers. Pour rappel, du côté du PLF, celui-ci est toujours en cours d’examen par les sénateurs qui devraient s’exprimer par un vote solennel le 15 décembre avant la réunion d’une commission mixte paritaire.



RECUN • Yann Le Cun, Français pionnier de l’intelligence artificielle, sur le point de quitter ses fonctions de directeur de l’IA chez Meta, a annoncé le 4 décembre dernier son projet de création, à Paris, d’une start-up d’intelligence artificielle. S’il ne dévoilera qu’en janvier 2026 les détails de cette nouvelle entreprise, on sait déjà que l’approche sera différente de celle des modèles génératifs dominants. Selon lui, les grands modèles de langage sont utiles, mais ne permettent pas de parvenir à une véritable intelligence générale ; il estime illusoire l’idée selon laquelle il suffirait d’augmenter la puissance de calcul et l'entraînement des modèles de LLM pour atteindre un niveau humain.

Au cours de cette annonce, Yann Le Cun a précisé que la future société développerait une nouvelle génération de modèles fondés sur l’apprentissage par perception du monde réel et par anticipation des actions, inspiré de la manière dont un enfant apprend à interagir avec son environnement. Il s’agit de prolonger les travaux menés au sein de Meta sur les architectures prédictives JEPA afin de permettre aux systèmes d’IA de disposer d’une forme de modèle mental capable de comprendre les effets de leurs actions dans des situations complexes. 

Le chercheur a également clarifié les perspectives d’organisation et de financement du projet. Il a indiqué que la start-up serait une entité globale, avec une présence à la fois en Europe et aux États-Unis, tout en révélant qu’elle serait installée à Paris, afin de mener ces recherches à l’écart de la Silicon Valley, qu’il juge trop fascinée par l’IA générative. Il a souligné que Meta soutiendrait certains travaux mais n’investirait pas directement dans l’entreprise, estimant que l’ampleur des applications potentielles allait au-delà de ce que le groupe souhaitait couvrir. 

Enfin, l’entrepreneur a insisté sur le fait que le développement de ces modèles ne nécessiterait pas les investissements colossaux exigés par les LLM contemporains, arguant que l’apprentissage à partir de données vidéo publiques permettait d’obtenir des progrès significatifs avec une puissance de calcul moindre.


Nos lectures de la semaine

  • Cette note du Think Tank Terra Nova sur les territoires périurbains, “terra incognita la plus habitée de l’Hexagone”. Entre croissance démographique, reconfiguration sociale, densification et transitions économiques, c’est une lecture intéressante sur ces espaces rarement visés spécifiquement. 

Hexagone est rédigé par Étienne Rabotin et Ghislain Lunven. À la semaine prochaine !

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