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Par Hexagone
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Eau non potable, Inéligibilité, et Accords syndicaux

L'actu des décideurs éco et politiques, sélectionnée et analysée pour vous chaque semaine


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Le week-end était long et vous n’avez pas suivi toute l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là. Joyeux mardi, nous sommes le 19 novembre, les départements et les maires sont tous en congrès à Paris, et voilà votre récap hebdomadaire, en un briefing et deux articles.


Le Briefing

Contexte a publié, le 14 novembre dernier, un rapport de trois inspections daté de juin, qui pointe les échecs de la préservation de la qualité de l’eau. La mission des inspections (inspections générales des ministères de la Santé, Igas, de l’Agriculture, CGAAER, et de la Transition écologique, IGEDD), avait été commanditée par le gouvernement Borne en novembre 2023, en pleine crise agricole.

Château d’eau de Cocherel - Atlas des Régions Naturelles (ARN), 2019 (archive-arn.fr)

DU GAZ DANS L’EAU La mission préconise une contribution du secteur agricole au financement des investissements pour dépolluer les captages d’eau et leurs aires d’alimentation. Cela passerait en premier lieu par l’augmentation de la redevance pour pollution diffuse (RPD), prélevée sur les ventes de produits phytos au bénéfice des agences de l’eau. Cette mesure reprend ce que prévoyait le plan eau, présenté par Emmanuel Macron en mars 2023. 

Le renoncement à cette hausse avait été acté dans le budget 2024, sous la pression des organisations agricoles. Aujourd’hui, ce choix crée de la tension dans les bassins avec les usagers non agricoles selon les inspecteurs, qui estiment nécessaire de revenir aux ambitions initiales dans le budget 2025. 

Pour le moment, le choix du gouvernement Barnier va à l’opposé, avec un projet de loi de finances qui non seulement n’inclut pas ce nouveau prélèvement, mais ponctionne 130 millions d’euros sur les agences de l’eau, dans le cadre de l’effort budgétaire imposé à toutes les administrations publiques.

Le rapport évoque les techniques agricoles permettant de diminuer ou se passer de produits phytosanitaires. Pour améliorer en amont la qualité de l’eau potable, il est indispensable de généraliser les pratiques agricoles à bas niveau d’intrants dans les aires d’alimentation, en privilégiant en particulier la stratégie de la « bonne culture au bon endroit » (luzerne, prairies permanentes, miscanthus…) plutôt que celle de la « bonne dose au bon moment ». 

Pour généraliser ces pratiques compliquées à mettre en place, le rapport recommande de s’appuyer sur les financements PAC orientés sur les dimensions environnementales, par exemple les paiements pour services environnementaux (PSE).

La définition d’une nouvelle feuille de route est annoncée par la ministre de la transition écologique Agnès Pannier-Runacher dans le cadre de la « grande conférence nationale » sur l’eau dont le lancement est prévu mi-décembre. 

Dans l’attente de nouvelles mesures, les contentieux eau, déjà récurrents depuis les directives européennes eau résiduaires urbaine (DERU, dont une nouvelle version est d’ailleurs en cours d’adoption) et eau potable (révisée en 2020), pourraient se multiplier compte tenu des non-conformités structurelles de la préservation de la qualité des eaux en France. 

Fin septembre encore, le flufénacet, produit pesticide dont les ventes ont doublé entre 2019 et 2022, et présent dans 86% des échantillons prélevés en France, était classé perturbateur endocrinien par l’EFSA : la présence de ce type de substance pourrait suffire à rendre non conforme l’eau des réseaux potables de plus de la moitié des français.

En juillet dernier, la Commission a ainsi saisi la Cour de justice de l’UE pour non-respect des concentrations maximales de nitrates dans l'eau potable, une situation qui perdure depuis des années sans nette amélioration. 

On ne peut clore le sujet eau sans évoquer la situation de la Guyane, qui, elle, souffre d’une sécheresse historique, accumulant des déficits de pluviométrie sur les 18 derniers mois. A un niveau tel que les habitants de villages isolés, comme Maripasoula dans le Sud, ne peuvent plus utiliser les voies de communication fluviales pour s’approvisionner en denrées de base. 

Le Préfet a déclenché le plan ORSEC “eau” et des militaires assurent des rotations pour parer à l’urgence, tandis qu’EdF doit alimenter par hélicoptère les centrales au fioul de Maripasoula et Papaïchton, qui consomment autour de 40 fûts de 200 litres de fioul par jour. 

Mais aussi

LE PEN COMPLEMENTAIRE • Difficile de ne pas avoir entendu parler du procès pour détournement de fonds publics du Front national, devenu Rassemblement national, dans lequel comparaissent 25 membres du parti. Facile, en revanche, de ne pas avoir les idées claires sur le sujet, tant le commentaire politique rend confus ce procès de grande ampleur, mais qui juridiquement n’est pas hors normes. 

Les faits, d’abord : 25 membres du parti, dont son ancienne présidente Marine Le Pen, sont soupçonnés d’avoir mis en place un système frauduleux d’emplois fictifs au parlement européen, destiné à financer les activités politiques du parti. Des militants auraient été recrutés comme assistants parlementaires pour éviter de les rémunérer sur les fonds propres du parti. 

Le préjudice estimé par le Parlement européen s’élève à près de 6,8 millions d’euros, soit quinze fois plus que dans l’affaire d’emplois fictifs du MoDem jugé début 2024. 

Le parquet a requis, le 13 novembre dernier, la condamnation de tous les prévenus, et particulièrement celle de Marine Le Pen à une peine de cinq ans de prison, dont deux ferme, 300 000 euros d’amende, et à une peine d’inéligibilité pour une durée de cinq ans.

Cette peine d’inéligibilité a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Contrairement à ce qui est couramment évoqué, cette peine existait bien avant la Loi Sapin II de 2016, et n’est pas “automatique”. En revanche, l’article 19 de la loi Sapin II “pour la confiance dans la vie politique” (c’est son nom complet) rend “obligatoire” le prononcé d’une peine complémentaire d’inéligibilité en cas de condamnation pour les délits d’atteinte à la probité publique, comme le détournement de fonds publics. 

Mais il y a une finesse : ce caractère “obligatoire” ne force pas les juges à prononcer cette peine complémentaire à tous les coups ; simplement, s’ils ne le font pas, ils doivent motiver leur abstention par une décision spéciale. 

Les faits reprochés aux prévenus s’étendent sur une période allant jusqu’au 31 décembre 2016, et la loi est entrée en vigueur 3 semaines plus tôt : de telles réquisitions n’ont donc rien d’exceptionnel, mais il est en théorie possible pour les juges de ne pas condamner Marine Le Pen et ses camarades à des peines d’inéligibilité. 

Au demeurant, si Marine Le Pen était condamnée à l’inéligibilité, cette peine pourrait prendre effet directement, sans que l’appel ne suspende son exécution, comme le permet l’article 471 du code de procédure pénale. 

Un tel mécanisme a déjà été utilisé pour des parlementaires, mais serait une première pour une candidate aux élections présidentielles, et il serait étonnant que les juges y aient recours. En revanche, le coup de semonce de la part du parquet a manifestement été entendu, à en juger par les réactions véhémentes des intéressés, qui pour le moment nient en bloc les faits reprochés. 

ENTENTE CORDIALE •  En moins d’un mois, les principaux partenaires sociaux (patronaux et syndicaux) sont parvenus à trois accords interprofessionnels majeurs, portant respectivement sur l’assurance-chômage, l’emploi des seniors, et les règles des mandats syndicaux. 

Dans un contexte politique tendu, ces trois documents, qui sont destinés à être transposés par voie législative et/ou réglementaire par le gouvernement dès début 2025, montrent une reprise du dialogue social après plusieurs années marquées par l’effacement des corps intermédiaires.

En bref, sur chacun des textes : 

  • Assurance chômage : économies de 2,4 Milliards sur 4 ans (2025-2028) en adoptant un principe de versement des allocations sur une base fixe de 30 jours/mois, mais amélioration des aides aux chômeurs repreneurs d’entreprise ;

  • Emploi des seniors : temps partiel spécifique pour la fin de carrière, accès à la retraite progressive dès 60 ans, certes non opposable aux employeurs.  

  • Mandats syndicaux : les syndicats ont obtenu, presque sans contrepartie, la levée des limites aux mandats syndicaux dans les Comités sociaux et économiques (CSE).

D’autres négociations s’annoncent déjà, mais sous de bons auspices, après ces discussions débloquées, notamment, dès janvier, sur l’usure professionnelle et la qualité de vie au travail, dans le cadre d’une “COP du travail” déjà promise par le gouvernement. 

Nos lectures de la semaine :

  • Ce rapport du Sénat sur l’état du football français après l’affaire Mediapro, qui mène une intéressante réflexion sur la gestion des droits de diffusion et l’intervention des fonds d’investissement dans un sport qui “vit au-dessus de ses moyens” et dont les ressources sont mal réparties ;

  • Le rapport de mission de l’IGF sur la transformation de France Télévision et Radio France et leurs stratégies numériques, dans la lignée de la réforme de l’audiovisuel public abondamment évoquée par Hexagone au printemps dernier. L’IGF préconise un regroupement de plusieurs rédactions, et l’investissement massif sur les médias non linéaires.


Hexagone est préparé et rédigé par Étienne Rabotin et Nicolas de Renghien, avec l’aide de Noé Viland. À la semaine prochaine !

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