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Par Hexagone
12 mars · 4 mn à lire
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Pour une poignée de Milliards

Pour une poignée de Milliards Mais aussi — Nucléaire, Bourse en hausse, Référendum…


Bonjour. Nous sommes le 12 mars 2024 et comme tous les mardis, nous vous avons concocté un condensé de l’actualité utile en France. Suivez-nous également sur X et LinkedIn !


Le Briefing

Le décret d’annulation de crédits dont nous vous parlions ici a poussé la commission des finances de l’Assemblée nationale puis celle du Sénat à auditionner le ministre de l’économie et des finances Bruno le Maire, et le ministre des comptes publics, Thomas Cazenave, dont c’était l’anniversaire le jour même - nous lui souhaitons le meilleur. 

La surprise est venue sans bougies : l’audition a été l’occasion pour les ministres d’annoncer 20 milliards d’euros d’économies supplémentaires pour l’exercice prochain.


@Loukian Jacquet@Loukian Jacquet

POUR QUELQUES MILLIARDS EN MOINS • Le gouvernement tablait précédemment sur 12 milliards d’économie mais la dégradation des perspectives de croissance a, selon le gouvernement, rendu nécessaire cet ajustement, qui devrait mettre à contribution toutes les administrations publiques (y compris, donc, la protection sociale et les collectivités territoriales). Bercy a revu sa prévision de croissance pour 2024 de 1,4% à 1%, et, partant, considère que le déficit public sera supérieur aux 4,9% du PIB initialement prévus. 

La nouvelle trajectoire doit permettre de respecter l’engagement de ramener le déficit public à 3% du PIB dans un contexte de pression des marchés financiers (avec des taux à 10 ans à près de 3% et la perspective de décisions défavorables des agences de notation) et de l’entrée en vigueur d’un “pacte de stabilité et de croissance” européen réformé en 2025. 

Si ce dernier prévoit des flexibilités entre 2025 et 2027 pour tenir compte de la récente hausse du coût de la dette, le budget français devra être drastiquement ajusté à cette échéance pour éviter le stigmate d’une nouvelle procédure pour déficit public excessif.

Bruno Le Maire a disséminé quelques indices concernant les pistes qu’il compte suivre pour traquer les dépenses : selon ses termes, la France “dépense 6 points de PIB de plus que la moyenne des autres pays européens sur les prestations sociales, la santé et les retraites”. 

Les suspects sont désignés. Mais pour porter l’effort de réduction des dépenses, un autre volontaire a aussi été désigné par les ministres. 

ECREMER LE MILLEFEUILLE • Devant l’Assemblée nationale, Bruno Le Maire évoquait déjà son envie de mettre les collectivités territoriales à contribution : “en matière de dépense publique, l’empilement n’est pas une option, le choix est une nécessité

C’est l’après-midi même, devant le Sénat, qu’il précisait : “l'accumulation de strates administratives nationales comme locales a un coût vertigineux” - et de redoubler : “Vous me dites qu'il faudrait peut-être supprimer des ministères, des opérateurs, ça ne me pose aucun problème [...] mais peut-être qu'il faudra aussi regarder entre communes, communautés de communes, EPCI,départements et régions s'il n'y a pas lieu aussi de simplifier les strates locales.”

La pique n’est pas anodine : le Gouvernement fourbit ses armes depuis déjà plusieurs mois pour ce débat sur la décentralisation et la simplification de l’organisation territoriale. Un rapport important a été commandé à Eric Woerth sur ce sujet précis, attendu pour le printemps. Interviewé en novembre dernier  lors du Congrès des maires, son auteur se disait tout sauf convaincu de l’utilité de supprimer une strate entière du millefeuille. 

Mais ses conclusions ne seront pas seules dans la balance : une mission menée par le maire de Charleville-Mézières, Boris Ravignon (seul depuis que son binôme, Catherine Vautrin, a été nommée ministre), devrait présenter sous peu son rapport sur le coût du millefeuille administratif. 

VIEUX FLOU DE MAIRE • Faut-il s’attendre à une remise en cause massive de l’organisation des collectivités locales ou de leurs établissements ? Le Sénat dans un rapport de 2020 écartait l’option d’une suppression des départements, tout comme les élus locaux, pour qui le département voit ses compétences injustement rongées par les intercommunalités. 

Deux ans après la loi 3DS, dernière loi d’envergure du premier quinquennat qui était loin du big-bang institutionnel promis, le débat pourrait reprendre sur de nouvelles bases, au moment où une proposition de loi pour rendre plus attractifs les mandats d’élus locaux, largement adoptée par le Sénat, est examinée à l’Assemblée - nous vous en parlions ici.


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Mais aussi

FISSION PARLEMENTAIRE Mardi 5 mars, les députés de la commission du développement durable ont rejeté le projet de fusion entre l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). 

Nous en parlions déjà le mois dernier, au moment de l’examen du projet de loi au Sénat. Le projet en était sorti largement remanié après des auditions extensives des dirigeants des deux entités et un rapport de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (OPECST). 

L’Assemblée nationale s’était déjà, de son côté, opposée à la fusion l’année dernière, réclamant un texte ad hoc et pourvu d’une étude d’impact, alors que le gouvernement l’avait introduite sous la forme d’amendements à la loi du 22 juin 2023 visant à accélérer le déploiement du nouveau nucléaire. 

Le gouvernement a pu rétablir son texte actant la fusion tard dans la nuit de lundi 11 mars lors de l’examen en séance plénière à l’Assemblée nationale. Le vote solennel de la loi est prévu le mardi 19 mars.

CAC 8000 • L’indice phare de la Bourse de Paris a dépassé les 8000 points pour la première fois de son histoire le 7 mars à la suite de bons chiffres des entreprises du Cac 40 qui ont dégagé en 2023 146 milliards d’euros de bénéfices nets cumulés, soit 3% de plus qu’en 2022.

Mais les raisons de ce record sont en grande partie à chercher en dehors de l’Hexagone. La conjoncture à l'international est en effet aussi excellente. L’indice Nikkei a dépassé son record de 1989 tandis que le DAX allemand atteint aussi des sommets historiques.

Parmi les grandes gagnantes tricolores, certaines comme le groupe Franco-Italo-Américain Stellantis ou les groupes de luxe bénéficient de leur exposition au marché américain en forte croissance. TotalEnergies profite, elle, des cours élevés du baril.

Les bourses ont aussi bénéficié d’un coup de pouce paradoxal de Francfort. Les prévisions peu enthousiasmantes de la Banque Centrale Européenne conjuguées avec une inflation qui descendrait plus vite que prévu vers la cible des 2% laissent imaginer un assouplissement monétaire plus important que prévu. Un scénario jugé “très probable” par le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau le 8 mars.

Pour autant peut-on parler de bulle? Une analyse de la Tribune souligne que les entreprises du CAC40 sont valorisées à 13 fois leurs bénéfices sur 12 mois, soit légèrement en dessous de la normale et presque deux fois moins que pour S&P américain. Néanmoins le ralentissement de la croissance et la montée du chômage en Europe vont sans doute tempérer l’enthousiasme actuel.

RIP HIP HIP, OU PAS • Près de deux mois après la censure partielle du projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » par le Conseil constitutionnel, Les Républicains reviennent à la charge en atteignant le seuil de signatures parlementaires pour le dépôt d’un référendum d'initiative partagée.

Se jugeant trahis par l'exécutif dans cet épisode (nos explications ici), les parlementaires de droite veulent recycler de nombreux dispositifs retoqués par le Conseil constitutionnel a travers un référendum d'initiative partagée (RIP). 

Parmi lesquels citons la restriction du panier des soins de l’Aide Médicale d’Etat ou un rallongement du délai de résidence des étrangers en France pour accéder aux prestations sociales non contributives.

Avec 187 signatures sur les 185 requises, la proposition de loi est désormais sur le bureau du Conseil constitutionnel qui doit dans le prochain mois vérifier sa conformité avec l’article 11 de la Constitution. 

En effet, si l'article 11 ne permet pas un référendum sur l’immigration, LR a fait le choix d’axer les mesures de cette proposition de loi sur le logement, la protection sociale ou médicale. Un coup de passe-passe qui divise les juristes.

Les sages devront aussi vérifier que les dispositions ne sont pas contraires à la constitution, et la restriction dans l'accès aux prestations sociales pourrait être vue comme une rupture du principe d'égalité à la loi.

Reste encore aux LR de recueillir les signatures de 10% du corps électoral, soit 5 millions de personnes sur les neuf prochains mois. 

Depuis la création du RIP lors de la réforme constitutionnelle de 2008, seule une proposition de loi a été jugée conforme à la constitution - sur la privatisation des aérodromes de Paris - mais n’avait atteint qu’un million de signatures.


Nos lectures de la semaine

  • Le think tank Euro Creative analyse pour le Monde les enjeux du rapprochement naissant entre Paris et l’Europe centrale.

  • Un sondage Elabe identifie les préférences des français pour reduire les depenses publiques avec les allocations familiales, le numérique et le chômage comme cibles prioritaires. 


Cette édition a été préparée par François Valentin, Étienne Rabotin et Ghislain Lunven de Chanrond. À la semaine prochaine !




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