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Par Hexagone
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Narcotrafic, Airbnb, Arrêts maladie et Emeutes

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Le week-end était long et vous n’avez pas suivi toute l’actualité de la semaine ? Pas de panique, Hexagone est là. Joyeux mardi, nous sommes le 5 novembre, et voilà votre récap hebdomadaire, en un Briefing et trois articles.


Le Briefing

Le ministre de l’Intérieur était en déplacement à Rennes vendredi dernier, où un enfant de 5 ans a été blessé par balle dans une affaire qui semble liée au narcotrafic. Bruno Retailleau, échangeant avec les habitants du quartier de Maurepas a annoncé sa volonté que la lutte contre le narcotrafic dispose des mêmes moyens que celle contre le terrorisme, “en termes de justice, de renseignement, de moyens, de législation”.

Un agent des douanes pose avec sa prise - aire de repos de Gidy (Loiret), 2020 - © DRD Centre-Val-de-Loire

WAR ON DRUGS La maire PS de Rennes, Nathalie Appéré, s’est dite “alignée” sur le ministre de l’Intérieur sur le sujet : « Aujourd’hui, j’assume d’être en phase avec Bruno Retailleau sur ce dossier. Nous avons une guerre à mener contre le narcotrafic, tous ensemble. La France est un grand pays qui a su agir contre le terrorisme il y a dix ans. La réaction contre les stupéfiants doit être de la même ampleur. »

Face aux violences liées au trafic, le ministre de l’Intérieur souhaite qu’un nouveau texte de loi soit présenté aux parlementaires en début d’année prochaine. Il pourra s’appuyer sur des travaux de réflexion récents sur le sujet.

Le 7 mai dernier, un rapport d’enquête sénatoriale, dont vous nous parlions ici, avait préconisé de créer un parquet national anti-stupéfiants spécialisé dans la lutte contre le narcotrafic sur le modèle du parquet anti-terroriste. La commission d’enquête avait chiffré à 3,5 milliards le volume de chiffre d’affaires minimum généré par le narcotrafic.

L’idée d’une juridiction spécialisée avait été reprise par Eric Dupond-Moretti le 28 avril dernier. Celui-ci avait annoncé le projet de création d’un PNACO, le parquet national anti-criminalité organisée, imaginé par l’ancien procureur national anti-terroriste Jean-François Ricard, nommé conseiller auprès du ministre. 

PARQUET ANTISTÉROÏDES Ce nouveau parquet aurait eu un droit d’évocation (qui permet de s’autosaisir de certains dossiers d’une particulière complexité) et des compétences élargies, au-delà des trafics de stupéfiants, s’attaquant aussi bien au blanchiment d’argent qu’à la corruption d’agents publics ou encore à la dimension « cyber » des affaires. A un niveau plus technique, il aurait, selon les préconisations du rapport, centralisé les « livraisons surveillées » de drogue par les services d’enquête, ou encore se serait occupé du suivi de certaines techniques d’investigation, comme celles relevant de la captation numérique.

Pour le moment, le dossier est en suspens, sans que l’on sache si le nouveau Garde des Sceaux entend reprendre à son compte le projet. 

Des maires de grandes villes françaises se mobilisent à travers l’AMF, qui a prévu d'organiser une table ronde sur le trafic de drogue, à l'occasion de son 106e congrès annuel. Le rendez-vous, prévu le 20 novembre à Paris, s'appuiera sur le rapport sénatorial du 7 mai 2024.

ACCOUTUMANCE Les pratiques de consommation augmentent, comme nous le signalions dans ce numéro d’Hexagone : en 2023, selon l’office français des drogues et tendances addictives, près d’un adulte sur dix (9,4%) déclarait avoir consommé de la cocaïne au moins une fois dans sa vie soit 3,8 points de plus par rapport aux données 2022. L’année 2023 a été marquée par un record de 315 faits d’homicides ou de tentative d’homicide liés au narcotrafic. 

Depuis 2022, la mission de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) a mis en place un programme de recherche (PIRALAD) pour mieux comprendre les comportements addictifs et mieux lutter contre ceux-ci. 

D’autres organismes se sont intéressés à la question, comme le CESE, qui a abouti, lui, à la recommandation de légaliser la consommation de cannabis, pour mieux en encadrer l’usage par les jeunes, pour qui la substance est particulièrement nocive. Une mission d’information de députés (présidée par un député LR et un LREM) avait conclu de manière similaire en 2021.

Mais aussi

FINI DE LOUER • La deuxième commission mixte paritaire organisée pour réformer le marché des locations meublées est parvenue à un accord sur la proposition de loi transpartisane portée par Annaïg Le Meur à l’Assemblée nationale. 

Très discuté depuis avril 2023, ce texte réforme notamment le dispositif fiscal avantageux des meublés touristiques type Airbnb, régi par l’article 50-0 du code général des impôts (CGI). Jusqu’à présent, le CGI prévoit un abattement fiscal à hauteur de 71% sur les loyers perçus sur les meublés “classés” (noté sur 5 étoiles par un organisme accrédité), et de 50% pour les meublés non classés ; une fois la loi votée, ces seuils seront ramenés respectivement à 50% et 30%, et les seuils en valeur absolue baissés (respectivement 77 700€ et 15 000 €).

Parmi les autres mesures d’encadrement, l’interdiction de location des passoires thermiques est aussi appliquée aux meublés touristiques, avec une entrée en vigueur échelonnée jusqu’à 2034. Les maires pourront décider de baisser à 90 jours par an la durée maximale de location cumulée pour un meublé touristique résidence principale, contre 120 par défaut, mesure qui devrait intéresser environ 40% des communes. 

Ce texte intervient alors que le modèle d’Airbnb est en voie de normalisation : le tribunal de commerce de Paris a récemment débouté le syndicat de l’hôtellerie (l’UMIH) de son action en concurrence déloyale, énonçant même que leurs activités étaient “complémentaires” sur certains territoires. 

Pour autant, les députés affichent déjà leur ambition de baisser encore ultérieurement les abattements fiscaux des meublés touristiques, dans la lignée d’un rapport parlementaire Courson-Labaronne de juillet 2023 qui évoquait les “avantages fiscaux aujourd’hui inacceptables” de la filière. La mission interministérielle IGF-IGEDD de mars 2023 préconisait, elle aussi de façon implacable, de “supprimer l’avantage fiscal en faveur des locations meublées”. Vous saurez tout des prochains rebondissements, grâce à Hexagone bien sûr.

CARENCE PAS FAITE • Parmi les 2 à 3 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’Etat qui restent à flécher pour atteindre l’objectif du gouvernement Barnier, une partie pourrait provenir d’une restriction des remboursements des arrêts maladie des fonctionnaires.

Le ministre Guillaume Kasbarian a annoncé que le gouvernement introduira des amendements en ce sens dans le PLF 2025, dont l’examen à l’assemblée reprendra le 5 novembre. Son plan implique deux leviers : étendre le délai de carence à trois jours, contre un jour actuellement (289 millions d’euros d’économies annuelles prévues), et plafonner l’indemnisation des fonctionnaires en arrêt à 90% de leur traitement, (900 millions d’euros par an). 

Ces mesures proviennent des préconisations d’un récent rapport IGF-IGAS qui notait que les absences pour maladie “sont sources de pertes d’efficience, de surcoûts et de désorganisation des services publics”, dans la lignée du rapport de la Cour des comptes de 2021 sur le sujet.

Pour justifier cette mesure impopulaire, le gouvernement avance qu’il s’agirait d’aligner les agents publics sur le régime privé, tout en réduisant les incitations à l’absentéisme dans la fonction publique. 

Pour autant, les études de l’INSEE élaborées après l’introduction du premier jour de carence en 2012 montrent que l’allongement du délai de carence incite les fonctionnaires malades à travailler, ce qui aggrave leur état de santé : après l’introduction du jour de carence, les arrêts de 2 jours avaient baissé de moitié, mais les arrêts de plus d’une semaine avaient augmenté de 25% (INSEE, 2017). 

Même effet sur les absences pour maladie dans l’éducation nationale : pas de réduction des absences injustifiées, mais multiplication des personnels venant enseigner malgré leur maladie (INSEE, 2024).

Enfin, le principe des trois jours de carence et de l’indemnisation à hauteur de 90% du salaire brut sont en effet la règle dans le privé. Mais 63,5% des salariés voient leurs jours de carence indemnisés par leur mutuelle d’entreprise (IDRES, 2017), et 70% ont des accords de branche leur permettant de toucher 100% de leur salaire brut (IGF-IGAS, 2024). Ces avantages ne seraient pas, en l’état, compensés pour les fonctionnaires.

TU CASSES, L’ETAT RÉPARE Le 25 octobre dernier, l’Etat a été condamné par la Cour d’appel de Paris à verser 392 000 euros en réparation pour les dommages infligés à des caméras de vidéo surveillance aux alentours de la tour Eiffel, dans le cadre des manifestations des gilets jaunes en 2019. 

Une condamnation qui s’ajoute à une longue liste d’affaires similaires, portant la facture totale sur l’ensemble du territoire, à environ 1 milliard d’euros pour l’Etat, en réparations pour de multiples et diverses dégradations causées par des manifestants sur les dernières années. 

Ces décisions correspondent à une logique de socialisation des dommages causés par les failles du maintien de l’ordre, que doit normalement assurer l’Etat. 

Ce dernier n’est cependant pas systématiquement condamné : le lien entre les dégradations et les manifestations devant être clairement établi, certains vols durant les émeutes urbaines n’ont, ainsi, pas été considérés par le juge comme ouvrant droit à indemnisation de la part de l’Etat. 

En ce qui concerne les collectivités territoriales, celles-ci peuvent également se retourner contre l’Etat. En revanche, une franchise de 2 millions d’euros s’appliquent désormais, au grand dam des élus qui pointent que ce régime ne protège de facto plus que les collectivités d’une certaine taille. 

Au point que certains élus ont avancé la solution de mettre en place un système équivalent au régime des catastrophes naturelle, dans lequel l’Etat prendrait un “arrêté de reconnaissance d’émeute” et se substituer dans ces cas exceptionnels aux assurances.


 


Nos lectures de la semaine


Hexagone est préparé et rédigé par Étienne Rabotin et Nicolas de Renghien, avec l’aide de Noé Viland. À la semaine prochaine !

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