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Par Hexagone
7 mai · 6 mn à lire
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Visite de Xi

Mais aussi — FNSEA, Sciences Po, Investissements étrangers…


Bonjour. Nous sommes le 7 mai 2024 et comme tous les mardis, nous vous avons concocté un condensé de l’actualité utile en France. Suivez-nous également sur X et LinkedIn !


Le Briefing

Pour la troisième fois depuis son ascension à la présidence de la République populaire de Chine, Xi Jinping sera en visite officielle en France. Les enjeux sont importants donc nos rédacteurs font le point sur cette visite officielle 60 ans après l’ouverture de relations diplomatiques avec la République Populaire de Chine.

Ursula von der Leyen, Emmanuel Macron et Xi Jinping © Compte X officiel d'Emmanuel MacronUrsula von der Leyen, Emmanuel Macron et Xi Jinping © Compte X officiel d'Emmanuel Macron

XI VA LA • La visite a débuté lundi, avec la réception de Xi Jinping à l'Elysée avant une réunion trilatérale avec le président de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Une volonté plusieurs fois affirmée d’Emmanuel Macron d’impliquer ses partenaires européens face à la Chine (le dîner le 2 mai dernier avec Olaf Scholz devait aussi permettre aux dirigeants d'aligner leurs positions). Les dirigeants ont également participé au forum économique franco-chinois au théâtre Marigny avant un banquet à l'Elysée. 

Pour les annonces, on retiendra le timide soutien de la Chine à une “trêve olympique” des conflits durant les Jeux de Paris ainsi que les exhortations d’Ursula von der Leyen et d’Emmanuel Macron à ce que la Chine use “de toute son influence sur la Russie” pour cesser la guerre en Ukraine. Selon Emmanuel Macron, la Chine s’est engagée à “s'abstenir de vendre toute arme, toute aide à Moscou et à contrôler strictement l'exportation des biens à double usage.”

Aujourd’hui les couples présidentiels sont attendus dans les Hautes-Pyrénées, au pays de Bigorre auquel Emmanuel Macron rappelle souvent son attachement familial. Il entend montrer à son hôte la table de l’un de ses amis restaurateurs dans un cadre plus “intime” puisque seul “un impressionnant convoi composé de plusieurs dizaines de véhicules” sécurisé par la gendarmerie se préparait dès lundi à les recevoir, notait La Dépêche.

DUR COMMERCE • Passage normalement obligé de ce genre de visite, les deux dirigeants n’ont pas annoncé la signature de contrats importants. La visite de 2019 avait notamment été accompagnée d’annonces de contrats dans l’agriculture, l'énergie mais encore dans l'aéronautique avec la signature d’un contrat à 30 milliards pour 290 Airbus.

Si les deux dirigeants n’ont pas annoncé de gros contrats cette fois, Reuters rapporte la signature de plusieurs accords en marge de la visite entre entreprises chinoises et françaises dont un partenariat dans l’industrie des batteries entre Xiamen et Orano, un protocole d’accord entre Envision et Suez ou encore plusieurs projets dans le secteur des transports en Chine.

Des annonces modestes par rapport aux précédentes visites, reflétant les difficultés européennes à accéder au marché Chinois. Dans son interview à La Tribune le 5 Mai, Emmanuel Macron avait fait part de son scepticisme sur les débouchés des produits UE sur le marché chinois à l'exception de “certains secteurs comme le luxe.” 

Sur la dernière décennie, la Chine a réduit ses importations de biens et de services, passant de 21,4% du PIB à 17,3%. Le déficit commercial de la France avec la Chine est considérable à 46,2 milliards d’euros en 2023. Un sujet qui est revenu à plusieurs reprises dans la bouche d’Emmanuel Macron et de Bruno Le Maire.

La Chine se méfie aussi de l'activisme aux accents protectionnistes à Bruxelles qu’on attribue à l'influence hexagonale. Face à l'enquête sur les subventions à la filière des voitures électriques chinoises, Pékin avait riposté notamment avec une enquête sur les eaux-de-vie de l’UE, au premier plan la filière du cognac qui exporte une bouteille sur quatre en Chine. Emmanuel Macron a fait passer cette inquiétude en offrant du cognac à Xi Jinping.

UN PEU D’HISTOIRE Cette année marque les soixante ans du rétablissement des relations diplomatiques avec la République populaire de Chine (RPC), la France étant la première puissance occidentale à reconnaître, en 1964, la RPC comme la Chine “officielle” au détriment de Taïwan (République de Chine).

La visite du Président chinois répond à celle d’Emmanuel Macron en Chine en avril 2023. A cette occasion, le chef de l’Etat avait appelé l’Europe à se constituer en “troisième pôle” et ne pas être “suiviste” des Etats-Unis sur le dossier Taïwanais en s’inscrivant dans une “logique bloc à bloc”. Ces déclarations avaient suscité de vives réactions : la Chine menait à ce moment des exercices militaires d’ampleur pour marquer sa désapprobation à la visite de la présidente taïwanaise Tsai Ing-Wen en Californie. 

Au cours de cette visite, Xi Jinping avait reçu Emmanuel Macron à Canton avec une cérémonie du thé dans l’ancienne résidence du père de Xi Jinping, ancien gouverneur de la province du Guangdong. La séquence prévue aujourd’hui dans les Hautes-Pyrénées au col du Tourmalet a pour but de rendre cette politesse. 

Au même moment, la Présidente de la Commission Ursula Van der Leyen s’était elle aussi rendue en Chine. Si cette simultanéité avait pour objet de présenter un front européen uni, il est notable que la couverture médiatique chinoise se soit alors concentrée essentiellement sur la visite d’Etat du président français, donnant à voir une stratégie chinoise de s’adresser aux Etats et non à la construction supra-nationale de l’Union. 

Comme l’année dernière dans tous les cas, cette visite d’Etat franco-chinoise intervient peu après une rencontre sino-allemande : la visite d’avril 2023 suivait celle d’Olaf Scholz de novembre 2022 et le chancelier allemand s’est de nouveau rendu en Chine le mois dernier. Au programme, l’ouverture du marché chinois aux voitures allemandes et les pratiques de dumping chinoises sur les voitures électriques. 

DOSSIER OUÏGOUR Si le soutien de la Chine à la Russie dans sa guerre en Ukraine est le sujet le plus central de la visite, les associations et politiques militant pour la dénonciation des exactions commises par la Chine contre les Ouïgours dans le Xinjiang se sont également mobilisés. 

Alors que Raphaël Glucksman, engagé de longue date dans la dénonciation de la déportation des Ouïgours, rappelle sa volonté “de ne pas se taire face aux crimes commis là-bas ou aux attaques menées ici” et “d’assumer les rapports de force” dans une tribune dans Le Monde, la tête de liste macroniste pour les européennes Valérie Hayer prenait la parole ce lundi sur Sud Radio pour qualifier de génocide ces exactions.

Surtout, la visite de Xi en Europe intervient alors que la Chine se livre à une nouvelle série d’intimidations aux alentours de Taiwan, cultivant plus que jamais l’ambigüité quant à la possibilité d’une attaque frontale, et sa certitude de l’inéluctabilité de la fin de l’indépendance taïwanaise. 

Mais aussi

HAPPY CULTEURS ? Les agriculteurs ont été reçus par Emmanuel Macron à l’Elysée le jeudi 2 mai. Cette rencontre honorait la promesse faite par le Président de la République lors de sa visite au Salon de l’agriculture le 24 février dernier. L’échéance avait été repoussée à trois reprises, la FNSEA, syndicat majoritaire, attendant au préalable des engagements concrets du gouvernement. 

60 engagements ont été pris entre temps (notamment un fonds d'urgence, des simplifications réglementaires, l'accélération de 100 projets de stockage d'eau ou d'irrigation, l’allègement de charges sur l'emploi de travailleurs saisonniers, etc.) L’ensemble des mesures aurait un coût compris entre 500 et 600 millions d’euros pour les finances publiques.

Dans le même temps, la commission des affaires économiques a commencé l’examen du projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole, et en ont approuvé l’article premier qui dispose que l'agriculture est « d'intérêt général majeur ». 

A l’issue de l’entretien, la coordination rurale, syndicat agricole marqué à droite, a appelé à une “exception agriculturelle” française et s’est dite frappée par “l’enfermement du Président de la République dans une logique de libre-échange”. Le Président de la FNSEA s’est dit, lui, “ni déçu, ni satisfait”.

En parallèle des mesures de soutien à l’agriculture, le gouvernement a présenté début avril une nouvelle mouture du plan Ecophyto qui maintient l’objectif de réduction de moitié des usages de pesticides d’ici 2030. 

En guise de concession aux agriculteurs, le gouvernement a décidé de ne plus recourir à l’indicateur qu’il utilisait jusqu’à aujourd’hui pour mesurer la réduction des pesticides (le Nodu) pour lui préférer l’indicateur européen HRI1. Une critique récurrente du monde agricole est en effet celle de la surtransposition des règles européennes, créant une distorsion de concurrence avec d’autres pays membres du marché commun. 


Partenariat commercial avec Peugeot.

Le nouveau E-3008 : l’incarnation de l’ambition de Peugeot dans l’électrique.

Peugeot vous présente le nouveau E-3008, la nouvelle génération de SUV électrique français. Le lancement du E-3008 scelle une étape majeure dans la transformation de Peugeot en marque 100% électrique. Le moteur électrique est fabriqué et produit par la joint-venture Stellantis-Nidec à Trémery en France.

Avec ce nouveau SUV fastback électrique disposant d’une autonomie de 527 à 680 km, Peugeot affiche ses ambitions dans l’électrique : 

  • Offrir la gamme électrique la plus large parmi les marques généralistes en Europe d'ici 2025. 

  • Réaliser 100% de ses ventes européennes en électriques d'ici 2030.

  • Son moteur électrique sera fabriqué et produit par la joint-venture STELLANTIS-NIDEC à Trémery (France), et le réducteur sera fabriqué et produit par Stellantis à Valenciennes (France).

DÉCOUVRIR LE E-3008


PÉCRESSE ARBITRE Depuis le milieu du mois de mars, des étudiants de Sciences Po participent à un mouvement de protestation organisé par le “Comité Palestine Sciences Po” consistant en des blocages de salles, des prises de paroles, et des manifestations débordant les proportions habituelles du débat étudiant. 

Ils demandent à Sciences Po d’organiser une cérémonie d’hommage aux victimes des bombardements israéliens sur Gaza, une condamnation officielle des actions de l’Etat hébreu contre les droits des Palestiniens, la cessation des partenariats universitaires avec les institutions soutenant “les idéologies sionistes”, notamment certaines universités israéliennes ayant apporté leur soutien à l’offensive en cours à Gaza. Nous parlions la semaine passée du régime disciplinaire spécifique aux universités et de son application à cette situation. 

Les réactions politiques et médiatiques sont focalisées sur le blocage comme mode de manifestation, d’une part, et sur certains symboles utilisés par les manifestants, dont plusieurs commentateurs hostiles au mouvement retiennent le caractère antisémite, malgré les dénégations des intéressés. 

Des députés en écharpe tricolore sont venus soutenir sur place le mouvement, quand d’autres personnalités déclaraient leur hostilité aux manifestants et à l’institution leur permettant de poursuivre leur mobilisation.

D’une opposition de postures médiatiques, irréconciliées depuis, a notamment surgi un débat sur le financement de l’institution qui vaut la peine d’être analysé juridiquement pour en comprendre la portée. 

Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France, a annoncé “suspendre” les financements régionaux à Sciences Po, semblant subordonner le versement d’une subvention au climat politique de l’université la recevant. Or, cette subvention est issue d’une Convention Etat-Région par laquelle la Région s’engageait à verser près d’un million d’euros annuels à Sciences Po, et qui ne prévoit pas de clause de retrait variant selon le contexte politique. 

La région n’a donc pas la faculté de la retirer pour ce motif : aux yeux de la loi une subvention ne peut être retirée que si les conditions de son octroi ne sont plus réunies. Elle sera donc ou bien versée plus tardivement, ou bien retirée sur un autre motif, qui resterait fragilisé par les motifs illégaux déjà annoncés. L’Etat, par la voix de la ministre Sylvie Retailleau, a d’ailleurs confirmé que ses propres subventions seraient bien versées. 

L’annonce de Valérie Pécresse, dépourvue de toute portée légale, doit en revanche être vue comme un moyen pour elle de se situer en juge de la posture politique de Sciences Po, ce qui n’appartient pas à ses compétences de présidente de région, mais qui lui a ouvert des colonnes médiatiques de premier choix. 

Rappelons à cette occasion le mode de gouvernance particulier de Sciences Po : une fondation privée reconnue d’utilité publique, la FNSP, détient les murs et reçoit une subvention de l’Etat à hauteur de 40% de ses ressources, perçoit les frais de scolarité et rémunère les personnels non titulaires ; cette fondation est surtout chargée de la gestion administrative et financière de l’Institut d’Etudes Politiques, structure d’enseignement et de recherche qualifiée de “grand établissement” par le code de l’éducation.

INVESTISSEMENTS : CHOOSE FRANCE • Pour la cinquième année consécutive, la France est le pays le plus attractif pour les projets d’investissements étrangers selon le classement du cabinet EY. Si le nombre de projets d’investissement est en légère baisse depuis 2022 (-5%), avec 1194 projets pour 40.000 emplois en 2023 la France est loin devant le Royaume-Uni second avec 985 projets.

De plus 44% des décisions d’investissements sont de nature industrielle, dont 17 projets dans le secteur de l’intelligence artificielle.

La moitié des projets captés sont en zones rurales ou dans des agglomérations de taille moyenne. Les cinqs régions qui captent le plus de projets sont l’Ile-de-France, Auvergne Rhône Alpes, Grand Est, Hauts de France et Occitanie.

Le gouvernement se félicite de ses chiffres, en augmentation nette depuis 2017. Les sommets “Choose France” sont devenus un événement important pour attirer des investisseurs étrangers. En 2023, 13 milliards d’investissements et 8000 créations d’emplois avaient été annoncés au sommet à Versailles. 76% des dirigeants sondés par EY pensent que l'attractivité de la France va s'améliorer dans les trois prochaines années. 

Parmi les facteurs structurels, EY souligne la “sanctuarisation du CIR, la réduction de l’impôt sur les sociétés, l'allégement des impôts de production, la refonte du régime des impatriés” ou la fluidification des démarches administratives.

Mais l'étude ajoute aussi des éléments de nuance au succès tricolore. Seuls 36% des projets sont de nouvelles implantations et 64% des extensions de projets, alors que les proportions sont inversées au Royaume-Uni et en Allemagne. 

De même en nombre d’emplois créés par ces projets la France est 3eme derrière le Royaume-Uni et l’Espagne à cause d’un faible nombre d’emplois par projet (41,6 contre 53 au Royaume-Uni ou 139,6 en Espagne).


A lire cette semaine :

  • Cette longue interview (en Français) d’Emmanuel Macron pour The Economist dans lequel il précise sa réflexion autour de la “mortalité” de l’Europe.


Cette édition a été préparée par Étienne Rabotin, Ghislain Lunven de Chanrond et François Valentin. À la semaine prochaine !

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