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Hexagone propose un résumé hebdomadaire concis, bien documenté et informatif de ce qui fait l'actualité en France.

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Par Hexagone
30 avr. · 4 mn à lire
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Note de la dette, sauvetage d’Atos, char du futur, manifestations étudiantes

L’essentiel de l’actu éco et politique de la semaine avec Hexagone


Bonjour. Nous sommes le 30 avril 2024 et comme tous les mardis, nous vous avons concocté un condensé de l’actualité utile en France. Suivez-nous également sur X et LinkedIn !


Le Briefing

L'État français a pris l'initiative d'acquérir les activités les plus critiques d'Atos, fleuron informatique français en difficulté, comme nous le mentionnions dans de précédents numéros (ici et ici). Le gouvernement a décidé d'intervenir face aux problèmes rencontrés par le groupe au cours des deux dernières années, alors que les perspectives de rachats partiels par Airbus ou la holding Czech Media Invest (CMI) de Daniel Kretinsky, se sont éloignés. Cette annonce rassure le groupe, entré en procédure de conciliation avec ses créanciers fin mars, et qui doit trouver une solution à son endettement massif de 5 milliards d'euros d'ici août.

Siège d'Atos à BezonsSiège d'Atos à Bezons

ATOS COMATE • Bruno Le Maire a annoncé le 28 avril sur LCI qu'une lettre d'intention avait été envoyée à Atos pour l'achat de ses activités “souveraines”, qui incluent les supercalculateurs, les systèmes critiques utilisés par les armées, et les produits de cybersécurité, représentant environ 10 % des revenus totaux d'Atos. Cette intention d'achat entend protéger les intérêts stratégiques de l’Etat, utilisateur de ces services, et qui négociait déjà depuis le 9 avril une golden share lui conférant des pouvoirs sur les activités sensibles du groupe.

Le ministère de l'Économie n'a pas divulgué les détails financiers de cette intention d'achat, mais une valorisation proche du milliard d'euros est évoquée. L'État cherche à impliquer plusieurs industriels français dans ce projet et des discussions sont en cours, bien que les noms des entreprises impliquées n'aient pas été divulgués. Thales et Dassault Aviation seraient des candidats potentiels. 

Airbus semble moins enclin à participer : un temps évoqué pour reprendre les activités Big Data, le groupe aéronautique se serait détourné en raison de pressions de l’Allemagne, Etat actionnaire à parité du groupe Airbus, appréciant peu que le gouvernement français utilise l’avionneur comme outil de préservation des intérêts stratégiques nationaux.

Quant au schéma capitalistique, Bercy envisage une structure similaire à celle de Naval Group et TechnicAtome, dans lesquels l'État et des industriels détiennent des parts. Parallèlement, la question se pose du sort des autres activités d'Atos, qui ne présentent pas le même niveau de sensibilité.

L’ancien patron d’Atos, Thierry Breton, a affiché sur France Inter le 29 avril son soutien à l'initiative de l'État français en soulignant l'importance de maintenir ces actifs en Europe. L’actuel commissaire européen chargé du Marché intérieur a défendu son bilan à la tête de l’entreprise, qu’il aurait quittée, malgré de nombreuses acquisitions, sans dette nette en 2019.

Mais aussi

FRENCH FRANCHISE Après plusieurs manifestations d’étudiants à Paris, d’abord à Sciences Po puis à la Sorbonne, les commentaires vont bon train sur les restrictions de la liberté académique des universités elles-mêmes et de leurs étudiants. Réservant leur parole à une éventuelle réforme qui dépasserait le stade de la déclaration politique, vos rédacteurs y voient l’occasion de se pencher sur un autre aspect de ces manifestations : le régime particulier de police administrative qui prévaut dans les établissements d’enseignement, qui vise à limiter les interventions policières dans ces lieux particuliers, est communément appelée “franchise universitaire”. 

Le code de l’éducation prévoit que les étudiants jouissent d’une protection particulière de leur expression politique et de leur liberté de réunion au sein des établissements, qui doivent mettre à leur disposition des espaces dédiés à “l’expression à l'égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels”. Même lorsque certains manifestent hors de ces espaces dédiés, ils ne doivent pas porter atteinte aux activités d’enseignement ni à l’ordre public.

En outre, pour réduire le recours à la force publique, le maintien de l’ordre au sein des établissements est assuré non pas par l’autorité administrative classique (maire, préfet) mais par le président de l’université. Lui seul est responsable de l’ordre de la sécurité, et il est de tradition que les forces de l’ordre ne puissent intervenir dans ses locaux sans qu’il en fasse la demande. Le droit positif précise que l’appel à la force publique se fait “en cas de nécessité” uniquement. 

En règle générale, il revient en effet au président de substituer à la réponse pénale une réponse disciplinaire, pour concilier la liberté de réunion avec “l’indépendance intellectuelle et scientifique” de l’établissement, par exemple en prenant des sanctions d’exclusion temporaire contre les organisateurs de blocages. 

Aussi a-t-on été étonné d’apprendre que le Premier ministre, qui n’a pas d’autorité sur les présidents d’université, ait “demandé” l’évacuation de la Sorbonne ce lundi, comme il l’aurait fait pour Sciences Po la semaine passée, “en lien avec la préfecture de police”. Alors que Sciences Po est actuellement dirigé par un administrateur provisoire, nommé par la ministre de l’enseignement supérieur pour, entre autres, “assurer le retour à la sérénité des débats”, “conformément au cadre rappelé par le Premier ministre” lors de sa visite inopinée à Sciences Po le 13 mars.


Partenariat commercial avec Peugeot.
Le nouveau E-3008 : un SUV électrique assemblé en France
Avec son nouveau E-3008, Peugeot affiche son ambition sur le marché européen des voitures électriques. Ce SUV portera donc les couleurs de la France avec une marque, un design et un assemblage français :
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- Son moteur électrique sera fabriqué et produit par la joint-venture STELLANTIS-NIDEC à Trémery (France), et le réducteur sera fabriqué et produit par Stellantis à Valenciennes (France).
- Même son système Audio sera made in France puisqu’il sera équipé du Focal® Premium Hi-Fi System.
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CHAR LATENT Le 26 avril, à Paris, les ministres de la Défense Sébastien Lecornu pour la France et Boris Pistorius pour l’Allemagne ont signé un protocole d'accord qui prévoit, après 7 ans de négociations, une répartition égalitaire de l’effort de production industrielle du futur système de combat terrestre (Main Ground Combat System, ou MGCS).

Ce programme, dit de “char du futur”, doit remplacer les chars Leclerc (France) et Leopard 2 (Allemagne) à partir de 2040 par un écosystème d’appareils articulé autour d’un char hautement technologique, “dronisable”, et disposant d’une forte puissance de feu. Selon les ministres, disposer d’un armement commun est essentiel pour rapprocher les entraînements et les interventions des deux armées dans le contexte d’une reprise des conflits à haute intensité en Europe. 

Pour l’accord de mise en oeuvre du “SCAF” (système de combat aérien du futur) initié au même moment en 2017, la France est cheffe de file et a la charge de notifier les contrats aux parties prenantes ; pour le MGCS ce sera l’Allemagne qui remplira ce rôle, en répartissant à 50% les travaux entre les deux pays. Pour autant, ni l’appareil, ni le nombre de commandes, ni le maître d’oeuvre principal n’ont été désignés. 

Les fabricants principaux seront Nexter-KNDS pour la France, et Rheinmetall pour l’Allemagne, accompagnés par Thales, Safran, MBDA et d’autres, qui s’appuient sur des tissus de PME de part et d’autre du Rhin.

L’Italie et les Pays-Bas ont exprimé leur intérêt à rejoindre le groupement industriel ; l’Allemagne souhaite en tout état de cause n’ouvrir le programme à d’autres partenaires qu’après la conclusion des premiers contrats substantiels par les fabricants français et allemands, c’est-à-dire en fin d’année, selon un calendrier prévisionnel.

DETTE NOTE • Vendredi dernier, les agences de notation Moody’s et Fitch se sont prononcées sur la qualité de la dette française. Avec 285 milliards d’euros de bons du Trésor à placer, l’enjeu était important, et la dégradation récente de la trajectoire des finances publiques ne laissait pas de place à beaucoup d’optimisme.

Pourtant, les deux agences ont maintenu leur notation ; AA2 pour Moody’s, et AA- pour Fitch, sans même dégrader leurs perspectives.

Selon les agences, la croissance du PIB français réel en 2023 a atteint 0,9%, près du double de la moyenne de l’UE. Surtout, le fort taux d'épargne des ménages (16,8%) devrait permettre une augmentation de la consommation lorsque la croissance reprendra.

Cependant, elles mettent en question la capacité du gouvernement à mettre en œuvre les économies annoncées et à réduire le déficit public en dessous de 3%. Dans l’UE, seuls l'Allemagne, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suède sont mieux notés (AAA) ; chez Moody’s, la France reste devant tous les autres pays de l’UE.

Une dégradation des notations aurait eu un effet modéré sur les finances publiques hexagonales. Le “spread” entre les obligations du trésor et le Bund Allemand n’a bougé qu’entre 3 et 4 points par baisse de cran. Il faut remonter à 2012 et la perte du AAA (Fitch) pour trouver un effet plus prononcé, avec 11 points de décrochage.

De son côté, Standard&Poor’s devrait présenter sa note annuelle le 31 mai 2024.


A lire cette semaine :

  • Le rapport annuel 2023 du Défenseur des droits, qui pointe : “L’État de droit, longtemps « incontesté et incontestable », est désormais menacé par l’érosion du respect des droits fondamentaux”, soulignant l’instrumentalisation politique du Conseil constitutionnel et l’inexécution massive des décisions de justice par les autorités.

  • Cet arrêt important du Conseil d’Etat, qui précise les règles garantissant l’indépendance et l’impartialité de la justice administrative, avec notamment ce nouveau principe : “l’exercice de fonctions dans l’administration par un membre de la juridiction administrative ne peut, par lui-même, constituer un motif mettant en doute son impartialité”.


Cette édition a été préparée par Étienne Rabotin, Ghislain Lunven de Chanrond et François Valentin. À la semaine prochaine !

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